Les Bien-aimés
France : 2010
Titre original : Les Bien-aimés
Réalisateur : Christophe Honoré
Scénario : Christophe Honoré
Acteurs : Catherine Deneuve, Chiara Mastroianni, Ludivine Sagnier, Louis Garrel
Distribution : Le Pacte
Durée : 2H15
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie : 24 août 2011
Réalisation : [rating:4.0]
Scénario : [rating:3.0]
Acteurs : [rating:4.0]
Musique : [rating:3.5]
Globale : [rating:4.0]
[five-star-rating]
Les Bien-aimés est le huitième film de Christophe Honoré et a été présenté en compétition officielle au festival de Cannes 2011. Encore une fois, le réalisateur s’est entouré de tous ses acteurs fétiches s’alignant dans la nouvelle vague du cinéma français : Louis Garrel, Ludivine Sagnier, Chiara Mastroianni… Mais une nouveauté cette année, Honoré voyage et sort de Paris (sa ville de prédilection pour ses autres films). Verdict.
Synopsis : Du Paris des sixties au Londres des années 2000, Madeleine, puis sa fille Véra vont et viennent autour des hommes qu’elles aiment. Mais toutes les époques ne permettent pas de vivre l’amour avec légèreté. Comment résister au temps qui passe et qui s’attaque à nos sentiments les plus profonds ?
La touche Honoré valorisée
Les relations amoureuses compliquées, Christophe Honoré, s’y connait, puisqu’il évoque ce thème dans tous ses films. Mais là encore, il mise sur l’originalité puisqu’il mettra en scène des relations contrastées et peu vues, misant sur la tradition et la modernité. Tout d’abord Madeleine (Catherine Deneuve / Ludivine Sagnier) est une femme libérée qui, toute sa vie, a trompé son mari avec l’homme qu’elle aimait : Jaromil (Milos Forman / Rasha Bukvic). L’adultère, qui s’est maintenant inscrit dans les mœurs est devenu disons une relation presque « classique ». Vera, sa fille, que l’on suit dans les années 90 et 2000 a le cœur partagé entre deux hommes elle aussi, mais entretient une relation particulière et pour le moins originale avec chacun d’entre eux : alors qu’elle considère Clément (Louis Garrel) comme son Sex-friend, c’est avec Anderson (Paul Schneider), un vétérinaire américain gay et séropositif, qu’elle veut fonder une famille. C’est d’ailleurs cette relation qui la détruira aussi bien mentalement que physiquement : « Parce que Vera demande mais donne aussi, et donne plus qu’on ne peut lui donner en retour » explique le scénariste Honoré, « c’est ce qui en fait un personnage tragique ». L’amour, les sentiments, les triangles amoureux, … c’est sa spécialité, comme on l’a vu dans Les chansons d’amour ; l’intimité et la séduction sont toujours valorisées par les plans serrés.
Comme pour chacun de ses film dramatiques, Honoré ne plonge pas le spectateur dans le mélodrame, même lorsque ses personnages meurent : on ne les voit pas mourir, on le sait, c’est tout. Tout est suggéré dans le film, grâce à la mise en scène parfaite, les expressions des personnages, leurs gestes, leur décisions, et évidemment grâce aux chansons (signées Alex Baupain, également auteur des Chansons d’amour) « qui s’intègrent dans la continuité de l’action, et prennent naturellement la place » souligne Honoré. « Ce sont des monologues intérieurs qui amplifient le lyrisme de l’intimité ». Les dialogues, sont justes et pertinents, toujours utiles et importants pour que les spectateurs comprennent tous les sentiments, mais restent secondaires. Sans jamais tomber dans la mièvrerie, Honoré reste léger tout en montrant les difficultés et l’impuissance intergénérationnelle.
Une autre originalité dans ce nouveau film : Lorsque Madeleine (Catherine Deneuve) se remémore son passé, Ludivine Sagnier, (Madeleine plus jeune) joue la scène dans la même pièce, « comme le fantôme de sa jeunesse » évoque l’auteur. Ce chassé-croisé, peu commun au cinéma, comporte une distance parfaite entre les actrices, ce qui en fait une scène réussie.
Voyage spatio-temporel et ouverture sur le monde
Le temps passe. Honoré étale son film sur quarante ans et pour faire passer les transitions en douceur, il filme des pieds, des chaussures, … pour prouver que le temps avance. « Les chaussures sont des objets de convoitise et de désir et ce sont d’ailleurs ces objets si seyants aux pieds de Madeleine qui vont conditionner une bonne partie de son avenir ! » éclaire Le réalisateur. Non seulement le temps passe et n’efface rien, mais en plus l’histoire ne se situe pas qu’à Paris. Non, elle voyage : à Prague dans les années 60, à Londres en 90, à Montréal au moment des attentats du 11 septembre… La caméra est constamment en mouvement, ne perdant jamais le spectateur, traversant à la fois les temps modernes et l’ambiance rétro des sixties. Toutes ces villes, sont bien-évidemment valorisées en filmant la vie quotidienne des personnages, et pas en montrant des lieux touristiques dans lesquels les habitants ne vont pas. C’est ce qui rend crédible tous ces voyage : A Paris ce n’est pas la place Vendôme qui est filmée, mais les rues du 18e arrondissement.
Qui dit voyage, dit personnages étrangers. En effets, les amoureux de Vera et Madeleine ne sont pas français : Jaromil est Tchèque, Madeleine ira même jusqu’à le suivre dans son pays par amour. Félicitations à Ludivine Sagnier qui a appris une partie de son texte en tchèque, une langue difficile à parler. Anderson lui, est américain, Paul Schneider se révèle d’ailleurs très talentueux à travers ce personnage gay et malade. Mais il n’est pas assez exploité, il n’y a aucune information sur ce qu’il devient après l’événement avec Vera, et c’est bien dommage. C’est assez frustrant. Comme son amoureux est américain, Chiara Mastroianni (Vera) a des dialogues en anglais, on la préfère quand elle joue en français puisqu’elle a tendance à sonner faux en anglais (mais on a conscience de la difficulté de jouer en anglais) : elle est plus naturelle en français et plus à l’aise (normal).
La morale sur le bonheur
Les Bien-aimés, ce sont deux femmes amoureuses de la vie et de l’homme. « Ce qui les rend attachants, parfois tremblants, c’est qu’ils sont toujours dans l’incertitude du sentiment de l’autre » accentue Honoré. Deux femmes qui traversent des étapes douloureuses et qui doivent faire des choix tout simplement pour être heureuses. Tandis que l’une ne le sera jamais, l’autre trouvera son bonheur, même si elle n’y a jamais cru. Le lien mère-fille entre Deneuve et Mastroianni est crédible, aussi bien grâce à leur talent d’actrices qu’au vrai lien familial qui les unit.
Enfin, concernant l’épilogue, on sent que l’auteur ne sait pas très bien comment finir le film qui se clôt un peu en nœud de boudin avec les personnages : disons que leur situation est assez triste. Mais le plan sur les chaussures (qui ont déclenché toute l’histoire) est assez joli et symbolique. La boucle est bouclée, Madeleine laisse sa vie derrière elle et la page est tournée.
De multiples références pour Christophe Honoré qui s’inspire de Truffaut avec L’Homme qui aimait les femmes ou bien de l’écrivain Milan Kundera avec son « Imprudence », thème principal des Bien-aimés, qui fait de lui un auteur reconnu de la nouvelle vague du cinéma français.
Résumé :
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Très bon film! Très bonne analyse!!
La boucle est bouclée dans ce film de manière très poétique et les émotions surviennent, presque, lorsqu’on s’y attend le moins! Très bon casting aussi!