Red Mob
Russie : 1992
Titre original : Chtoby vyzhit
Réalisation : Vsevolod Plotkin
Scénario : Aleksandr Aristov, Elena Karavaeshnikova, V. Plotkin
Acteurs : Vladimir Menshov, Aleksandr Rozenbaum, S. Veksler
Éditeur : Le Chat qui fume
Durée : 1h53
Genre : Action
Date de sortie Blu-ray : 15 avril 2022
Russie, 1992, après l’effondrement de l’U.R.S.S. – Ancien officier d’élite et vétéran de la guerre d’Afghanistan, Oleg dirige un camp de survivalistes en plein désert. Il se voit proposer de convoyer une caravane liée aux trafics d’armes et de drogue. Oleg refuse, mais lorsque son fils est kidnappé en représailles, il n’a d’autre choix que d’accepter la mission. Pris en tenaille entre le KGB et la mafia russe, l’ex-soldat va être confronté à un déchaînement de violence…
Introduction
Le Chat qui fume et les films que vous ne verrez jamais sur Netflix – Vague 1
L’explosion de Netflix et de quelques autres services de SVOD en France a, en l’espace de quelques années seulement, considérablement affaibli le secteur de la vidéo physique en DVD et Blu-ray. Aujourd’hui, les éditeurs vidéo doivent avoir recours à différentes astuces afin de maintenir les consommateurs dans leur giron. Cela dit, grâce à une présence accrue sur les réseaux sociaux, à des éditions collector en pagaille et à de « beaux objets » prenant la forme de luxueux coffrets, Le Chat qui fume est peu à peu parvenu à faire son trou dans le cul cœur des cinéphiles français, et à devenir un des acteurs les plus incontournables de son secteur d’activités.
Cependant, ce n’est pas parce qu’on s’est imposé comme le leader incontesté qu’il faut se reposer sur ses lauriers, et quitte à prendre des risques, Le Chat qui fume vient encore d’innover, en lançant le mois dernier une nouvelle série de films d’exploitation au format Blu-ray. Peut-être considérés comme un peu plus « obscurs » que les autres films disponibles dans le catalogue de l’éditeur, les cinq premiers titres de cette série parallèle sont de bonnes grosses raretés des années 70/80/90, ne faisant peut-être pas partie des plus connues et prestigieuses, mais ayant régalé les écumeurs de vidéoclubs à la grande époque de la VHS triomphante. Proposés à bas prix et dans des boîtiers standard, ces cinq films bénéficient de l’expérience – désormais unanimement reconnue – du Chat qui fume en matière de soin éditorial, et s’offrent de fait des éditions Blu-ray absolument inespérées.
Les cinq raretés proposées par Le Chat qui fume au sein de cette première vague sont :
Draguse ou le Manoir infernal – Patrice Rhomm, 1976
L’Aube sauvage (Savage Dawn) – Simon Nuchtern, 1985
Le Souffle maudit (Demon Wind) – Charles Philip Moore, 1990
Mutronics (The Guyver) – Screaming Mad George & Steve Wang, 1991
Red Mob (Chtoby vyzhit) – Vsevolod Plotkin, 1992
Si vous ne les avez peut-être pas tous loués dans les années 80/90, ces films, vous les connaissez tout de même, de nom ou de réputation – vous avez probablement lu des articles à leur sujet dans Mad Movies ou dans Impact, à la grande époque de Jean-Pierre Putters. On espère que ce galop d’essai trouvera son public, et saura attirer les amateurs de bandes déviantes vintage en France de la même façon qu’aux États-Unis. Cela fait un moment en effet que le marché a évolué dans cette direction aux États-Unis, pays où tous les nanars bénis de l’époque de la VHS, même les plus improbables ou les plus méconnus, voient le jour en Haute-Définition. Une bonne affaire pour des cinéastes tels que Fred Olen Ray, David DeCoteau, Jim Wynorski, Andy Sidaris, Rick Sloane, Kevin Tenney, Douglas Hickox ou Albert Band, hier méprisés, aujourd’hui largement remis sur le devant de la scène…
Si on est loin, très loin, d’en être au même point en France, Le Chat qui fume a tout de même fait le choix avec cette vague de se tourner vers le passé, quitte à exhumer de petits films que l’on n’aurait jamais cru voir débarquer en France il y a encore quelques années. Dans les 80’s, le crédo des éditions René Chateau était de nous donner à découvrir « les films que vous ne verrez jamais à la télévision ». Se posant dans la continuité de l’éditeur historique, Le Chat qui fume semble aujourd’hui bien déterminé à offrir au consommateur « les films que vous ne verrez jamais sur Netflix ».
Le film
[4/5]
Rares sont les initiés qui connaissaient Red Mob avant que Le Chat qui fume ne l’exhume dans sa vague de Blu-ray du mois d’avril. Totalement inédit en France, que cela soit au cinéma ou en vidéo, ce film russe s’imposera néanmoins sans peine comme une série B d’action tout à fait incontournable – un film tellement riche en gunfights, en explosions en tous genres et en scènes spectaculairement over the top que l’on se demande bien comment il a pu rester inédit si longtemps.
Car Red Mob ne fait pas simplement partie de ces films d’action honteusement oubliés tels que Remo sans arme et dangereux, The Big heat, Tiger on the Beat ou Police Story 3 – le film de Vsevolod Plotkin n’a même jamais eu l’opportunité de marquer nos mémoires par le biais d’une quelconque édition VHS en France – on le rapprochera en cela d’un film tel que Ninja Busters (1984), petite merveille quasi-inconnue chez nous. Seuls les spectateurs les plus curieux – voire les plus aventureux – auront pu découvrir ce joyau inconnu qu’est Red Mob avant Le Chat qui fume.
On ne pourra ainsi s’empêcher de se dire que le métier d’éditeur vidéo nécessite non seulement une sacrée paire de balloches mais également un réel désir de « transmission », dans le sens où une partie du boulot éditorial effectué ici par Le Chat qui fume consiste vraiment dans le fait de porter notre regard vers cette œuvre inconnue, afin de nous faire découvrir dans toute son originalité. Et cette audace éditoriale – qui représente quoi qu’on puisse en penser un risque financier bien réel, d’autant que l’éditeur ne quadrille pas le Web de publicités et d’annonces en tous genres – se doit d’être saluée, mais également d’être encouragée : on vous incite donc à acheter et à découvrir Red Mob au plus vite.
Dans Red Mob, on fera rapidement connaissance avec Oleg, un vétéran de la guerre d’Afghanistan, incarné par Vladimir Menshov, réalisateur oscarisé de Moscou ne croit pas aux larmes. Suite à l’enlèvement de son fils Yura (Mitya Volkov) par une poignée de salopards liés à la Mafia russe au Moyen-Orient, il acceptera à contrecœur de prendre la tête d’un convoi de contrebande de drogue et d’armes à travers le désert. Il va sans dire qu’Oleg, secondé par son ami soldat Nikolai (Sergey Veksler), ne tardera pas à déclarer une guerre totale au chef des bad guys, le fourbe Jaffar (Alexander Rosenbaum).
Si on n’a pas pris la peine de les recompter, on fait confiance à la bande-annonce américaine de Red Mob, qui annonce rien de moins « 17 vrais hélicoptères et 42 véhicules totalement détruits ». Et c’est vrai que le film de Vsevolod Plotkin, très inspiré par les délires guerriers de la fin des années 80 type Rambo III / Le Scorpion rouge, offre vraiment aux fans de cinéma d’action pile ce qu’ils sont venus voir. Fusillades à grandes salves de mitrailleuses, mais également au bazooka et au lance-roquettes, explosions, scènes de sièges longues et souvent impressionnantes. Réalisé bien avant que les images de synthèse ne deviennent la norme dans ce genre de films, Red Mob enchainait les moments de bravoure avec de vrais cascadeurs, de vraies explosions et de vraies véhicules détruits. Très rythmé et divertissant, le film s’impose dans sa deuxième partie comme un véritable festival d’action, qui nous permettront de balayer d’un revers de la main les rebondissements un peu tirés par les cheveux, les personnages trop peu développés ou encore la vision très « russe » que le film nous propose des musulmans ou de la notion de « masculinité ».
Dans l’ensemble, les scènes d’action sont maîtrisées et assez bien découpées, mais ce sont surtout les scènes mettant en scène des hélicoptères qui feront tout le sel de Red Mob : toutes semblent avoir été réalisées avec ce qui ressemble à du matériel militaire russe, et elles laisseront au spectateur la plus grande impression. Bref, autant dire que les sensations fortes sont de la partie, avec à la clé un final absolument dément, n’ayant pas grand-chose à envier au cinéma US.
Le Blu-ray
[4,5/5]
Comme aime à le chanter Jean-Louis Aubert sur les plateaux de Thierry Ardisson, à peu près tous les deux ans quand une de ses émissions s’arrête, « Voilà, c’est fini… » – On termine en effet ce jour notre découverte de la (belle) salve de Blu-ray sortis en avril chez Le Chat qui fume, avant, on l’espère, d’entamer celle consacrée aux sorties du mois de juillet. Comme les autres films listés en début d’article, Red Mob débarque donc dans une édition Blu-ray inespérée, et intègre les rangs de ce qu’on pourrait appeler les éditions « simples » de l’éditeur, s’affichant dans des boitiers en plastique transparent, et bénéficiant toujours du talent de graphiste de Frédéric Domont. On notera d’ailleurs que sur les titres de cette vague, les chanceux ayant opté pour la précommande ont également bénéficié d’une surjaquette dessinée par Grégory Lê.
Côté master, Le Chat qui fume nous propose une très belle copie, respectueuse du rugueux grain d’origine, avec un beau piqué et des couleurs qui en envoient plein les mirettes – la restauration a fait place nette des poussières et autres points blancs, et le résultat s’avère vraiment excellent. Les plus tatillons pourront certes avancer que les scènes de nuit sont extrêmement granuleuses, mais il semble que ce défaut soit imputable aux conditions de tournage. Côté son, VO russe et version anglaise nous sont proposées en DTS-HD Master Audio 2.0. Les deux mixages sont parfaitement clairs, nets et sans bavures. On notera par ailleurs que le film est proposé dans deux montages (l’un russe, l’autre américain), légèrement différents l’un de l’autre – le montage américain, au doublage peu réaliste, est légèrement plus long que son homologue russe.
Outre la bande-annonce américaine du film, dont on vous parlait quelques lignes plus haut, le Blu-ray de Red Mob édité par Le Chat qui fume comprend également deux entretiens avec le producteur américain du film, Arthur Schweitzer. Au cours du premier entretien, intitulé « Produire Red Mob » (18 minutes), Schweitzer reviendra sur la genèse du projet, qui lui a été présenté par des investisseurs norvégiens dans le but de produire le premier film d’action russe tourné « à l’américaine ». Il se remémorera le tournage en Russie, très « pro-américain », et le fait que Boris Eltsine leur ait permis d’obtenir l’aide du ministère de la Défense et du KGB. D’ailleurs, la rumeur prétendait que l’acteur / réalisateur principal Vladimir Menshov était en réalité un agent du KGB, mais pour en être sûr, il faudrait demander à Sergueï Jirnov. Il évoquera également l’achat des hélicos et de surplus de l’armée, du fait de devoir tourner dans des endroits reculés pour pouvoir utiliser de vrais explosifs, ainsi que des blessures survenues sur le plateau, notamment lorsque l’un des acteurs principaux s’est cassé la jambe en sautant d’un hélicoptère. Il reviendra également sur les deux montages du film, la volonté du producteur étant d’adapter le film au public russe et au public international, mais n’expliquera pas dans le détail les différences entre les deux versions de Red Mob.
Le deuxième entretien, intitulé « Tournage au quart de tour » (24 minutes), sera moins centré sur le film, mais permettra à Albert Schweitzer de revenir sur son parcours : arrivé dans le petit monde du cinéma presque par hasard, après avoir remporté un concours de photo, il deviendra assistant de production à seulement quinze ans. Il est ensuite passé par le montage (bandes-annonces, publicités), la promotion, la distribution (sur Hamburger, film sandwich notamment), les acquisitions vidéo et TV, et a finalement créé sa propre société, Cinevest. Il terminera en évoquant une poignée d’anecdotes concernant des films sur lesquels il a travaillé : ses démêlés avec Romano Scavolini, notamment concernant le montage de Cauchemars à Daytona Beach, sa collaboration avec Wildman Steve sur Super Soul Brother, un voyage dans le Mississippi où le KKK était très présent, etc. Pour vous procurer cette édition limitée à 1000 exemplaires, rendez-vous sur le site de l’éditeur !