La Fête de la musique est désormais derrière nous. Les Marches des fiertés diverses et variées ne vont pas tarder. Et les élèves s’impatientent de quitter les bancs de l’école. Bref, ça sent fortement l’été dans l’air plus ou moins chaud et orageux, en fonction des régions françaises. Du côté du cinéma, cette saison rime traditionnellement avec l’hégémonie sans partage de films américains, l’enchaînement des blockbusters ne laissant généralement guère de place aux productions locales. Il y a quelque chose de cela dans le programme des sorties de ce mercredi, certes. Mais dans l’ensemble, les spectateurs les plus assidus pourront se réjouir d’une offre de nouveaux films particulièrement riche pour un début d’été. Merci les distributeurs qui ont le courage de croire dur comme fer en leurs films, malgré un contexte économique qui n’a toujours pas complètement récupéré de la crise sanitaire !
Comme d’habitude, nous vous conseillons trois films, même si rien que la durée exceptionnelle du premier devrait vous occuper pendant une bonne partie de votre semaine cinéma. Présenté sous forme de trois chapitres, la docu-fiction Les Travaux et les jours de C.W. Winter et Anders Edström vous fera ressentir tout le travail et la patience pour mener à bien un projet agricole, aussi anodin soit-il. Tourné sensiblement plus vers l’avenir, le grand gagnant des derniers German Film Awards I’m Your Man de Maria Schrader dissèque avec beaucoup d’humour les rapports romantiques pas toujours évidents entre une scientifique et l’homme de ses rêves. Enfin, le lauréat des prix espagnols sort de même ce mercredi, en offrant à Javier Bardem un autre rôle d’envergure comme patron pas si irréprochable que cela dans El buen patron de Fernando Leon De Aranoa.
Peut-être également digne d’intérêt : un trio de films américains à peu près bien dans l’air du temps, avec le retour un brin mercantile de l’irascible Buzz l’éclair, désormais privé de Woody et la bande de l’univers Toy Story, Ethan Hawke dans son premier grand rôle d’épouvantail macabre depuis American Nightmare de James Demonaco en 2013, quoique cette fois-ci de l’autre côté du spectre moral dans Black Phone de Scott Derrickson et enfin ce que l’on pourrait appeler éventuellement le grand retour de Baz Luhrmann, si Elvis ne parlait justement pas d’Elvis Presley, une icône musicale dont l’attrait à l’international reste plus que jamais à prouver, près de 45 ans après sa mort au mois d’août 1977.
Le cinéma français s’en sort à peine mieux avec de même trois films dont le plus insignifiant nous paraît être L’Homme parfait de Xavier Durringer, le pendant paresseux de I’m Your Man ou comment ne surtout pas éviter tous les poncifs de l’homme-robot. Après des débuts très prometteurs, la carrière de Michel Leclerc s’est finalement montrée assez inégale. Espérons que la comédie dramatique à forte valeur musicale Les Goûts et les couleurs fera de nouveau pencher la balance de notre appréciation en sa faveur. Enfin, lui aussi très mélodieux, le documentaire Le Divorce de mes marrants de Romy Trajman et Anaïs Straumann-Lévy évoque un lourd passé familial sous une forme filmique délibérément débridée.
La seule et unique ressortie de la semaine constitue probablement la proposition de cinéma la plus pure et esthétiquement envoûtante, à travers le magistral retardataire du mouvement néo-réaliste qu’est Bandits à Orgosolo de Vittorio De Seta.
Black Phone de Scott Derrickson (États-Unis, Horreur, 1h43) avec Ethan Hawke, Jeremy Davies et James Ransone
El buen patron de Fernando Leon De Aranoa (Espagne, Satire, 2h00) avec Javier Bardem, Manolo Solo et Almudena Amor
Buzz l’éclair de Angus MacLane (États-Unis, Animation, 1h40)
Le Divorce de mes marrants de Romy Trajman et Anaïs Straumann-Lévy (France, Documentaire, 1h23)
Elvis de Baz Luhrmann (États-Unis, Biographie filmique, 2h39, distribué sur 683 copies) avec Austin Butler, Tom Hanks et Olivia Dejonge
Les Goûts et les couleurs de Michel Leclerc (France, Comédie, 1h50, distribué sur 205 copies) avec Rebecca Marder, Félix Moati et Judith Chemla
L’Homme parfait de Xavier Durringer (France, Comédie, 1h25) avec Didier Bourdon, Pierre-François Martin-Laval et Valérie Karsenti
I’m Your Man de Maria Schrader (Allemagne, Science-fiction, 1h48) avec Dan Stevens, Maren Eggert et Sandra Hüller
Jungle rouge de Juan José Lozano et Zoltan Horvath (Suisse, Animation, 1h32)
Les Travaux et les jours de C.W. Winter et Anders Edström (Japon, 8h38, Drame) avec Tayoko Shiojiri, Hiroharu Shikata et Ryo Kase
Reprise
Bandits à Orgosolo (1960) de Vittorio De Seta (Italie, Drame, 1h37) avec les bergers sardes