Test Blu-ray : Le Dénonciateur

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Le Dénonciateur

États-Unis : 1950
Titre original : Captain Carey, U.S.A.
Réalisation : Mitchell Leisen
Scénario : Robert Thoeren
Acteurs : Alan Ladd, Wanda Hendrix, Francis Lederer
Éditeur : Sidonis Calysta
Durée : 1h22
Genre : Policier, Film Noir
Date de sortie cinéma : 11 mai 1951
Date de sortie DVD/BR : 1 février 2022

Deuxième Guerre Mondiale. Plusieurs agents américains sont envoyés dans l’Italie sous la botte allemande pour saboter un réseau ferroviaire. Dénoncés à l’ennemi, la plupart sont tués. L’Europe désormais en paix, le capitaine Carey, qui compte parmi les rares survivants, revient sur les lieux du drame, dans la région de Milan, bien déterminé à démasquer le traître…

Le film

[3,5/5]

La Clé de verre, Tueur à gages, Le Dahlia bleu, Trafic à Saïgon : de la carrière d’Alan Ladd, on connaît surtout de nos jours les quatre Films Noirs qu’il a tourné aux côtés de Veronica Lake, archétype de la Femme Fatale propre au genre. Le fait que l’Histoire du Cinéma ait choisi de retenir principalement ses quatre collaborations avec Veronica Lake est probablement du aux points communs qui liaient les deux stars : leur petite taille, leur accession fulgurante à la célébrité, mais également leur alcoolisme et leur fin tragique, Alan Ladd et Veronica Lake s’étant tous deux éteints à l’âge de seulement cinquante ans.

Pour autant, tout au long des années 40, Alan Ladd a multiplié les films et les partenaires féminines prestigieuses : on pense par exemple à Loretta Young, Dorothy Lamour, Olivia de Havilland, Deborah Kerr, Arlene Dahl ou encore Virginia Mayo. Pas mal pour un petit homme d’un mètre soixante-cinq, dont on sait qu’il devait régulièrement monter sur une caisse pour paraître plus grand que les actrices à qui il donnait la réplique… Alan Ladd a d’ailleurs enchaîné plus de 180 films entre 1932 à 1964 : l’expression de violence contenue et de souffrance morale qui habitait ses traits est tout particulièrement notable dans Le Dénonciateur, Film Noir teinté de guerre dans lequel il capitalisait sur sa légendaire froideur taciturne.

Le film de Mitchell Leisen permettait d’ailleurs à Alan Ladd de retrouver un rôle assez similaire à celui qu’il tenait dans Les Héros dans l’ombre (1946), un de ses grands succès de l’après-guerre. Dans Le Dénonciateur, l’acteur incarne en effet à nouveau espion de l’OSS, de retour dans une Italie encore dévastée après le conflit pour rechercher un traître dont les efforts ont entraîné la mort de plusieurs personnes, dont sa fiancée. Un peu oublié et souffrant d’une réputation peu flatteuse, le film n’en demeure pas moins suffisamment solide, rythmé et intéressant pour maintenir l’attention du spectateur en éveil pendant un peu plus d’une heure vingt.

La première partie du Dénonciateur se déroule pendant la guerre, en Italie occupée par les Nazis : le capitaine Carey (Alan Ladd) est à la tête de plusieurs hommes cachés dans une espèce de grand palais aristo isolé sur une île. Le soldat vit une romance passionnée avec Giulia (Wanda Hendrix), la petite-fille de la comtesse locale, mais voilà : une escouade de soldats nazis débarque, plusieurs soldats sont tués, ainsi que Giulia. Passé ce traumatisme initial, l’essentiel du film se déroulera en fait quelques années plus tard : de retour aux États-Unis, en découvrant chez un marchand d’art une des œuvres du palais italien, qu’il avait pourtant pris soin de cacher dans une alcôve secrète dont l’existence n’était connue que de quelques personnes. Il décide de retourner en Italie pour retrouver la personne qui a fait sortir le tableau, et se retrouvera bientôt entraîné dans une série de rebondissements, de machinations et autres subterfuges d’après-guerre typiques du Film Noir, et qui rappelleront forcément au cinéphile les épreuves auxquelles est confronté le héros du chef d’œuvre de Carol Reed Le Troisième homme.

Au fil du récit, assez efficace dans son genre, le personnage incarné par Alan Ladd deviendra une espèce de paria, qui plus est suspecté de deux meurtres perpétrés avec un poignard de l’OSS. Le Dénonciateur déroule ainsi son intrigue en développant suffisamment de tension pour mener à un climax très intéressant, tout en portant un regard sévère vis-à-vis des collabos ayant facilité la tache des nazis et des fascistes pendant la guerre. Malheureusement, à cause de l’accent très net mis sur l’histoire d’amour entre Carey et Giulia, mais aussi à cause du fait qu’identifier au moins un des coupables ne se révélera pas un immense mystère pour le spectateur, le film de Mitchell Leisen ne parvient jamais réellement au niveau de tension qu’il aurait pu atteindre si l’ensemble avait été mené avec davantage de rigueur.

Néanmoins, Le Dénonciateur demeure un divertissement très fréquentable, porté par un Alan Ladd remarquable et par une galerie de seconds-rôles tout à fait solides : on pense bien sûr tout d’abord à Wanda Hendrix, parfaite dans le rôle de la Femme Fatale de service, mais également à Celia Lovsky, Joseph Calleia ou encore Francis Lederer, qui confère à son personnage de baron un charme narquois du meilleur effet.

Le Blu-ray

[4/5]

Jusqu’ici inédit au format DVD / Blu-ray en France, Le Dénonciateur s’offre aujourd’hui une belle édition Blu-ray grâce à Sidonis Calysta, qui permet au film de Mitchell Leisen de venir grossir les rangs de sa « Collection Film Noir ». Côté master, le film a bénéficié d’une jolie restauration. Cependant, s’il affiche un beau piqué et d’une définition vraiment accrue, demeurent néanmoins quelques faiblesses, notamment quelques artefacts du type poussières et rayures, ainsi qu’un léger manque de stabilité du côté des contrastes. Reste néanmoins un sublime noir et blanc, magnifié par les compositions de plans plutôt habiles de Leisen. Côté son, Sidonis Calysta nous propose de découvrir le film en VO / VF et DTS-HD Master Audio 2.0 (mono), dans des mixages solides, disposant d’une belle amplitude et de la plus parfaite clarté. Les voix sont un poil plus étouffées sur la version française, mais dans les deux cas, la musique d’Hugo Friedhofer est bien mise en valeur : un Blu-ray absolument satisfaisant.

Niveau bonus, Le Dénonciateur suit consciencieusement les habitudes éditoriales de Sidonis Calysta sur sa « Collection Film Noir » : la bande-annonce du film s’accompagnera donc d’une sympathique présentation du film par François Guérif (13 minutes), synthétique, pertinente et tout à fait agréable à suivre – comme d’habitude, cette dernière évoquera le roman dont il s’inspire, c’est-à-dire « Les morts ne parlent plus » de Martha Albrand (Presses de la Cité, 1949), mais également le tournage en Italie ou encore son côté « film de fantômes ». Le packshot qu indique une présentation du film signée Betrand Tavernier, mais il s’agit d’une erreur : on poursuivra en réalité avec une présentation du film par Patrick Brion (11 minutes), qui reviendra comme à son habitude sur le contexte de production du film, tout en nous faisant partager sa passion pour l’acteur principal du film, Alan Ladd.

Enfin, si une poignée de sites concurrents évoquent la présence sur le Blu-ray d’un portrait d’Alan Ladd par Jean-Claude Missiaen ou encore d’un documentaire sur Alan Ladd, vous pouvez être à peu près certains qu’ils n’auront pas réellement visionné le disque, puisque cette édition du Dénonciateur ne contient pas la moindre trace de ces bonus. En contrepartie, on trouvera une présentation du film par Olivier Père (24 minutes). Ce dernier reviendra de façon extrêmement complète sur le contexte de tournage, la place du film dans la carrière de Mitchell Leisen, le contexte historique, etc. Très intéressant !

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