La costumière japonaise Emi Wada est décédée le 13 novembre dernier. Elle était âgée de 84 ans. Sa famille n’a annoncé son décès que dimanche dernier, sans donner plus de détails. Grâce à la splendeur de ses créations pour Ran de Akira Kurosawa, Wada bénéficiait d’une réputation hors pair dès son deuxième film. Elle a pourtant travaillé assez sporadiquement pour le cinéma, notamment avec les réalisateurs Peter Greenaway et Zhang Yimou, au profit de ses innombrables costumes pour le théâtre.
Une perfectionniste dès ses débuts, Emi Wada exigeait de créer l’ensemble des costumes pour les films sur lesquels elle allait travailler. Une ambition au prix élevé que peu de producteurs étaient prêts à financer. Ainsi, avant Ran, elle n’avait collaboré qu’à un seul film, Marco de Seymour Robbie en 1973. Douze ans plus tard, le chef-d’œuvre de Akira Kurosawa inspiré de William Shakespeare lui assurait une place dans l’Histoire du cinéma, grâce à ses costumes magnifiques qui reflétaient autant les traits de caractère des personnages que l’action. Avant de retrouver Kurosawa au début des années ’90 pour Rêves, elle avait également collaboré avec Kon Ichikawa (Rokumeikan et Taketori monogatari) et Hiroshi Teshigahara (Rikyu).
Après un bref détour par la télévision publique américaine avec « Oedipus Rex » de Julie Taymor en 1993, Wada avait renoué avec le cinéma par le biais de The Bride With White Hair de Ronny Yu. Or, son principal collaborateur au cours des années ’90 était le réalisateur gallois Peter Greenaway dont on se souvient surtout pour son esthétique visuelle recherchée et ses comédiens peu vêtus. Néanmoins, Emi Wada avait signé responsable du manteau de Prospero dans Prospero’s Books, ainsi que des costumes japonais de The Pillow Book et de ceux de 8 femmes ½, en compétition au Festival de Cannes en 1999.
Pour son dernier film du siècle, Emi Wada avait fait équipe avec son compatriote Nagisa Oshima sur Tabou, le dernier film tout court du réalisateur iconoclaste. Ensuite, elle s’était une dernière fois surpassée en termes de splendeur de costumes pour deux films consécutifs du réalisateur chinois Zhang Yimou : Hero en 2002 et Le Secret des poignards volants deux ans plus tard. L’ultime film auquel elle avait participé était Love After Love de Ann Hui, présenté au Festival de Venise en 2020.
Emi Wada a gagné l’Oscar des Meilleurs costumes en 1986 pour Ran. A ce jour, elle n’est qu’une de trois costumières asiatiques honorées de la sorte à Hollywood aux côtés de Sanzo Wada (La Porte de l’enfer) et de Eiko Ishioka (Dracula). Sans oublier leur consœur indienne Bhanu Athaiya pour Gandhi. L’Académie du cinéma britannique avait nommé Emi Wada à deux reprises dans la catégorie des Meilleurs costumes pour Ran en 1987 et pour Le Secret des poignards volants en 2005. Son travail sur « Oedipus Rex » lui avait valu l’Emmy des Meilleurs costumes d’un programme musical ou de variété en 1993.