Nobody
États-Unis, Japon : 2021
Titre original : –
Réalisation : Ilya Naishuller
Scénario : Derek Kolstad
Acteurs : Bob Odenkirk, Aleksey Serebryakov, Connie Nielsen
Éditeur : Universal Pictures
Durée : 1h32
Genre : Action, Thriller, Comédie
Date de sortie cinéma : 2 juin 2021
Date de sortie DVD/BR : 13 octobre 2021
Hutch Mansell, un père de famille sans histoire, accumule un tas de frustrations. Une nuit, alors que deux cambrioleurs pénètrent chez lui, il fait le choix de ne pas intervenir, plutôt que de risquer une escalade sanglante. Une décision qui le discrédite définitivement aux yeux de son fils Blake. Mais cet incident réveille chez cet homme blessé des instincts larvés qui vont le propulser sur une voie violente, révélant des zones d’ombres et des compétences létales insoupçonnées…
Le film
[4/5]
Imaginé par Derek Kolstad, qui se trouve être le scénariste de John Wick, conçu et chorégraphié par les équipes de cascadeurs de 87eleven comme un véhicule d’action destiné à imposer Bob Odenkirk en nouvelle icône badass du cinéma de bourrins, Nobody ne pourra certainement pas être considéré comme un film foncièrement original.
Comme la saga mettant en scène Keanu Reeves, le nouveau film d’Ilya Naishuller (Hardcore Henry) a pour personnage central un homme seul, Hutch Mansell, affrontant et dézinguant à lui-seul des douzaines de truands armés jusqu’aux dents. Le personnage central de John Wick était une légende surnommée « Baba Yaga » (le croque-mitaine) dans le monde du crime, celui de Bob Odenkirk dans Nobody est celui d’un « nettoyeur » venu de nulle-part, dont l’existence est cachée par le gouvernement.
Dans les deux cas, il s’agit presque d’une figure mythologique, d’un « one man army », figure récurrente du cinéma d’action désignant un combattant lourdement armé et bien entraîné, capable d’affronter seul de nombreux ennemis. Ainsi, sous ses atours de petit comptable à la vie bien rangée, le personnage incarné par Bob Odenkirk laissera peu à peu entrevoir un tout autre visage. Comme on pouvait s’y attendre, Nobody développe rapidement une série de tentacules narratifs relativement familiers des amateurs, qui conduiront le personnage central au cœur d’une escalade insensée de violence.
C’est presque tout pareil donc. Mais presque seulement, parce que Nobody s’avère beaucoup plus drôle et décalé que son modèle – la personnalité de Bob Odenkirk a toujours été plus ou moins facétieuse (le mec a tout de même débuté en écrivant des sketches pour Ben Stiller, Jack Black et le Saturday Night Live), et les auteurs du film s’adaptent à cette dernière en développant tout au long du film un humour noir assez réjouissant. Outre les passages mettant en scène le train-train quotidien de Hutch Mansell, on pense aussi et surtout à ce final aussi jouissif que cartoonesque prenant place dans une usine au cœur de laquelle le personnage a pris soin d’installer une large série de pièges à cons à la Maman j’ai raté l’avion… Sauf que bien sûr ces derniers s’avèrent violemment mortels (ou mortellement violents).
La présence au casting de Christopher Lloyd et du rappeur RZA rajoute encore un peu à la fantaisie de l’ensemble, de la même façon que celle d’Aleksei Serebryakov (Alexeï Serebriakov), qui campe à l’écran un chef de la mafia russe à la fois redoutable et grotesque. Et en réalité, ce décalage humoristique s’avère vraiment salvateur pour Nobody : ce qui manque au film en termes d’originalité est en effet compensé par une construction minutieuse des personnages et des scènes d’action, avec un Bob Odenkirk incarné une espèce de camé à l’adrénaline s’en prenant souvent plein la gueule, mais dont la riposte est aussi sévère et radicale que les coups qu’il reçoit.
Derrière la caméra, Ilya Naishuller prouve à nouveau, ici avec l’aide des cascadeurs de chez 87eleven, qu’il est un véritable prodige en ce qui concerne la mise en scène de l’action : Nobody est plein de style et techniquement irréprochable. Les gunfights et les combats à mains nues sont remarquablement chorégraphiés, et certaines scènes du film s’imposeront d’ailleurs probablement comme des références dans leur domaine (la baston dans le bus, le final dans l’usine…). Il faut également avouer que le film est porté par la performance hallucinante de Bob Odenkirk, qui s’est entrainé dur pour apparaitre à l’écran à la fois comme un combattant crédible et dangereux et comme un Mr Tout-le-monde ne faisant pas de vagues. Il semble d’ailleurs tout à fait à l’aise dans les deux registres – l’action et l’émotion – et on ne doute pas que l’acteur aura prochainement l’occasion d’explorer d’autres aspects de la personnalité de Hutch Mansell dans une ou plusieurs suites de Nobody.
Le Blu-ray
[4/5]
Le Blu-ray de Nobody édité par Universal Pictures nous propose véritablement une expérience Home Cinéma au taquet : l’image est littéralement superbe, même dans ses nombreux passages nocturnes, et rend parfaitement hommage à la belle photo du film signée Pawel Pogorzelski, collaborateur régulier d’Ari Aster (Hérédité, Midsommar). La définition est précise, les couleurs très saturées sont respectées à la lettre, et même durant les séquences les plus chaotiques à l’écran (fumée, couleurs vives qui tranchent net), le master tient toujours parfaitement la route et nous ravit pleinement les mirettes. On notera d’ailleurs un petit grain cinéma tout à fait appréciable, même si on devine qu’il a probablement été rajouté en post-prod afin de donner un petit côté « roots » supplémentaire au film. Côté son, c’est également du lourd de gros bourrin qui pète tout dans la baraque, en VO comme en VF. Nous aurons donc droit en version originale à un puissant mixage Dolby Atmos (qui sera décodé en Dolby TrueHD 7.1 par les amplis non compatibles), et le moins que l’on puisse dire, c’est que le film en imposera au spectateur tant du point de vue visuel qu’acoustique, avec des passages littéralement tonitruants et des effets dynamiques de toutes parts. La version française, disponible en Dolby Digital + 7.1, saura également tirer son épingle du jeu d’un point de vue sonore : le mixage tape dur, et durant les scènes d’action, la spatialisation apportera au spectateur son lot de petites surprises aux quatre coins de la pièce. Un superbe boulot.
Dans la section suppléments, et outre un commentaire audio du réalisateur Ilya Naishuller et de Bob Odenkirk (VOST), l’éditeur nous propose tout d’abord une petite série de scènes coupées (5 minutes), ou plutôt alternatives dans le sens où elles mettent en scène l’agent du gouvernement interprété par J. P. Manoux, recherchant des infos sur Hutch non pas à l’initiative du personnage de Beta (incarné par la compagne du réalisateur Darya Charusha), mais de celui interprété par Michael Ironside. On continuera ensuite avec un panel assez complet sur la préparation du film, avec tout d’abord une featurette dédiée à la préparation physique de Bob Odenkirk (4 minutes), qui s’enchaînera avec un intéressant making of (13 minutes) qui donnera la parole au réalisateur ainsi qu’aux acteurs du film tout en nous donnant à voir quelques prévisualisations des scènes d’action, assurées par les équipes de 87eleven. Enfin, on terminera avec quatre focus sur les grosses scènes d’action du film : préparation, prévisualisations, défis techniques, vous saurez tout sur la scène de fight dans le bus (6 minutes), celle de la maison assiégée (4 minutes), celle de la course-poursuite à bord de la Dodge Challenger (3 minutes) et enfin sur celle de l’usine (6 minutes), présentée par le réalisateur comme le « dessert » arrivant à table après un repas copieux – il sous-entend par cette métaphore culinaire que l’idée est de donner un maximum de plaisir au spectateur avec une scène plus légère, sucrée, colorée et amusante.