Critique : Digger

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2001

Digger

Grèce : 2019
Titre original : –
Réalisation : Georgis Grigorakis
Scénario : Georgis Grigorakis, Maria Votti, Vangelis Mourikis
Interprètes : Vangelis Mourikis, Argyris Pandazaras, Sofia Kokkali
Distribution : JHR Films
Durée : 1h41
Genre : Drame
Date de sortie : 21 juillet 2021

3.5/5

Agé de 38 ans, le grec Georgis Grigorakis, né à Athènes, a fait ses études au Royaume-Uni, commençant par la psychologie, continuant par la photographie puis la réalisation de films de fiction à l’école nationale de film et de télévision de Beaconsfield. Après la réalisation de 7 court-métrages, Digger est son premier long métrage, un film présenté dans la section Panorama de la Berlinade 2020.

Synopsis : Quelque part au nord de la Grèce, à la frontière de la Macédoine. Nikitas a toujours vécu sur son bout de terrain au cœur de la forêt. En lutte depuis des années contre une compagnie minière qui convoite sa propriété́, Nikitas tient bon. Le coup de grâce tombe avec le retour de Johnny, son fils qui, après vingt ans d’absence et de silence, vient lui réclamer sa part d’héritage. Nikitas a désormais deux adversaires, dont un qu’il ne connaît plus mais qui lui est cher.

Un père et son fils

Dans quel pays nous entraine ce réalisateur grec ? Dans quel pays peut-il tomber un tel déluge de pluie, dans quel pays peut on observer un tel torrent de boue qui emporte tout sur son passage ? Tout simplement en Grèce, au nord du pays, dans la région de la Macédoine. Nikitas, un homme d’une soixantaine d’années, vit seul dans une masure au milieu de la forêt et il tire ses revenus de sa production de pommes, de noix, de châtaignes et de kiwis. Une vie austère qui semble parfaitement lui convenir puisqu’il refuse obstinément les propositions financières d’une compagnie minière à qui l’achat des terrains de Nikitas permettrait une grosse économie sur la construction d’une route. Dans le village proche, partagé entre celles et ceux qui veulent à tout prix rester et celles et ceux qui voient l’occasion de commencer une nouvelle vie, il est considéré comme étant le rempart le plus important face à la compagnie minière, ce « monstre » qui pollue les sols « en jetant ses débris toxiques dans les jardins, qui rompt l’équilibre de la nature, qui dérègle le climat et crée des conflits, des guerres ». Beaucoup dans le village apprécient ses combats verbaux avec les représentants de la compagnie minière, que ce soit pour les accuser d’être les responsables du torrent de boue qui a failli l’emporter ou pour protester contre l’abattage d’un noyer plein de noix.

Un beau jour, ou, plutôt, une belle nuit, arrive une moto que Nikitas n’attendait pas et c’est avec un fusil qu’il accueille son conducteur. Ce conducteur, c’est son fils Johnny que sa mère avait emmené avec elle alors qu’il était encore un gamin lorsqu’elle en avait eu assez de la vie dans la forêt et que la mer lui manquait. Johnny présente à son père un document, le testament de sa mère : « Je soussigné, Eleni Douka, par ce testament fait de mon fils John Douka le seul bénéficiaire légal de mes biens après ma mort, soit la moitié des 40 000 m2 de terres agricoles partagées avec mon mari Nikitas Kontaxis ». Dans quel camp va se ranger ce fils que Nikitas n’a pas vu grandir, qui s’intéresse surtout à la pratique du moto-cross et qui ne connait rien à la forêt ?

Deux thèmes qui se croisent

Pour les touristes qui la visitent, la Grèce est un pays maritime inondé de soleil. Pour certains de ses cinéastes, le plus connu étant Théo Angelopoulos, la Grèce semble être avant tout un pays aux ciels bas et aux hivers rudes. Pour son premier long métrage, Georgis Grigorakis se range auprès de ces cinéastes et c’est en plein automne, dans le nord du pays, dans la région montagneuse du Mont Cholomon, à proximité de Thessalonique, qu’il est allé tourner Digger. Deux thèmes principaux se croisent dans ce film. Le premier a trait aux rapports entre un père et un fils qui se retrouvent mais qui ne se connaissent pas vraiment. Le père est un homme solitaire, travailleur et obstiné. Sa femme est partie parce qu’elle ne supportait plus l’environnement qu’il avait choisi pour abriter leur couple, elle a emmené Johnny avec elle et c’est elle qui l’a élevé. Très habilement, le réalisateur « ballade » le spectateur tout au long du film, lui donnant parfois l’impression qu’un lien fort est petit à petit en train de se créer entre le père et le fils et lui donnant l’impression inverse quelques scènes plus tard. Le deuxième thème réside dans le combat d’un homme, Nikitas, contre ce qu’il appelle le monstre, une compagnie minière qui saccage son environnement. La Grèce a connu il y a quelques années des manifestations contre de grandes exploitations minières, les plus importantes concernant l’ouverture d’une mine d’or dans la forêt de Skouries. Ce monstre peut être vu comme une métaphore d’un système économique qui ne prend pas en compte l’équilibre de la nature dans sa recherche du profit d’un côté, la soif consumériste de l’autre. Ce monstre est en quelque sorte illustré dans le film par l’excavatrice particulièrement puissante qui donne son titre au film, un engin capable de détruire mais également capable de sauver.

 

Un western grec !

Digger est bien sûr un film qui se regarde et la photographie de Giorgos Karvelas ne mérite que des louanges, d’autant plus que les conditions météorologiques n’étaient pas toujours très favorables en matière de lumière. Digger est aussi un film qui s’écoute, les bruits s’y révélant d’une grande importance : bruits de la forêt, bruits de la moto de Johnny, bruits du chantier de la mine, etc.. Vangelis Mourikis, l’interprète de Nikitas, est très connu et très estimé en Grèce. Son expérience lui a permis d’être très actif dans l’écriture du scénario. Argyris Pandazaras, le comédien qui interprète Johnny, est avant tout un acteur de théâtre. C’est également le cas de Sofia Kokkali, l’interprète de Mary, la jeune femme qui tient le bar dans lequel se retrouvent les habitants du village pour discuter, pour chanter, pour danser. Ce bar, on pourrait presque le qualifier de saloon, tellement Digger a presque toutes les caractéristiques d’un western. Un retour à l’envoyeur dans la mesure où, très souvent, les westerns ont très souvent les caractéristiques d’une tragédie … grecque !

Conclusion

Pour son premier long métrage, le réalisateur grec Georgis Grigorakis a su trouver le ton juste pour faire se croiser les deux thèmes qui lui tenaient à cœur : les retrouvailles d’un père et d’un fils séparés depuis de longues années et le combat obstiné d’un homme contre une compagnie minière qui saccage son environnement. Nul doute que les amateurs de bons westerns sauront apprécier ce film !

https://cineday.orange.fr/films/digger-CNT000001t5W2c/videos/

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