Le cinéma français dans toute sa splendeur et sa diversité débarque cette semaine sur les écrans nationaux. En effet, il y en aura pour tous les goûts ou presque dans ces pas moins de six sorties majeures. Parmi elles, on vous conseille comme d’habitude trois en particulier, même si l’on ne trouve guère à redire aux ébats amoureux à la Marguerite Duras chez Benoît Jacquot, aux coups tordus des adeptes du bling-bling lors du grand retour de Bernard Stora, plus de vingt ans après son film précédent Un dérangement considérable, et aux galères familiales dans lesquelles Michèle Laroque s’embarque dans son deuxième film en tant que réalisatrice.
Deux de ses consœurs font encore plus d’étincelles que Laroque depuis ce mercredi. La première, Nine Antico, débute avec une petite comédie pétillante au casting bien dans l’air du temps. Sur cette Playlist au noir et blanc joliment rétro se croisent Sara Forestier, Laetitia Dosch et Grégoire Colin, entre autres. Puis, l’omniprésente Céline Sciamma a eu le temps de nous concocter un conte d’enfants à la fois étrange et enchanteur avec Petite maman que son distributeur a sans doute eu raison de sortir après la fête des mères.
Enfin, quoi de plus viril qu’un film s’intitulant Des hommes ? Après, en connaissant quand même un peu la filmographie de Lucas Belvaux, cela nous étonnerait fortement que le réalisateur ait abandonné l’actrice attitrée de ses deux derniers films Emilie Dequenne pour aborder sans finesse le sujet historique épineux de la guerre d’Algérie. Avec un trio de comédiens légendaires en prime, cette sélection au Festival de Cannes de l’année dernière mérite en tout cas mieux que d’être ensevelie dans l’avalanche de sorties avant l’été !
Mais il n’y a pas que des productions françaises au cinéma cette semaine, bien au contraire, en dépit d’une délégation hollywoodienne des plus répétitives !
Pour quasiment chacun des quatre films américains à l’affiche depuis hier, on peut trouver des œuvres qui avaient d’ores et déjà traité des sujets similaires avec plus de verve cinématographique et d’originalité. Par exemple, les démêlés de Billie Holiday avec la justice américaine faisaient l’objet du documentaire de James Erskine sorti fin septembre. Mission Paradis de Richard Wong est le remake de la formidable comédie belge Hasta la vista de Geoffrey Enthoven sortie il y a neuf ans. Et dans Nobody de Ilya Naishuller, Bob Odenkirk endosse le costume fatigué du justicier ordinaire, repris à quelques détails près aux films de Charles Bronson des années 1970 et ’80. Quant au drame romantique All My Life de Marc Meyers, il respecte au moins le cahier de charges des sorties techniques, c’est-à-dire qu’il n’est visible que dans deux petites salles en province.
Heureusement, le cinéma est-européen est là pour sauver la mise étrangère. Tout d’abord à travers le coup de cœur de notre cher confrère Jean-Jacques Mère et fille de Jure Pavlovic, un magnifique pendant croate à The Father de Florian Zeller, dans les salles depuis une semaine. Mais aussi grâce au sombre conte de la Guerre froide Les Séminaristes de Ivan Ostrochovsky et, sur un ton infiniment plus enlevé, avec un programme de courts-métrages d’animation tchèques. Bref, à condition de chercher en dehors des sentiers battus du cinéma américain, vous pourriez faire de très belles découvertes au cinéma cette semaine !
Et tout cela sans même prendre en compte la considérable sélection de films repris en salle cette semaine ! Nous en avons parlé très récemment ici. Permettez-nous donc de simplement vous conseiller chaudement l’ample rétrospective de la première partie de la filmographie de l’immense réalisateur iranien Abbas Kiarostami, répartie en vingt œuvres longs-métrages et courts confondus.
Les deux autres films de retour dans les salles en ce début du mois de juin se rejoignent dans leur vision décalée du monde. Si l’univers onirique de Juliette ou la clef des songes de Marcel Carné reste encore dans les clous de la bienséance de rigueur au début des années ’50, George A. Romero a largement dépassé les pires craintes de ses commanditaires évangéliques avec son heure de cauchemars éveillés, enfin distribuée au cinéma dans The Amusement Park, plus effrayant qu’amusant !
All My Life de Marc Meyers (États-Unis, Drame romantique, 1h33) avec Jessica Rothe, Harry Shum Jr. et Ever Carradine
Billie Holiday Une affaire d’état de Lee Daniels (États-Unis, Drame historique, 2h10, distribué sur 267 copies) avec Andra Day, Leslie Jordan et Natasha Lyonne
Chacun chez soi de Michèle Laroque (France, Comédie, 1h23, distribué sur 500 copies) avec Michèle Laroque, Stéphane De Groodt et Alice De Lencquesaing
Des hommes de Lucas Belvaux (France, Drame, 1h41, distribué sur 361 copies) avec Gérard Depardieu, Catherine Frot et Jean-Pierre Darroussin
Mère et fille de Jure Pavlovic (Croatie, Drame, 1h37) avec Daria Lorenci, Neva Rosic et Vera Zima (critique)
Mission Paradis de Richard Wong (États-Unis, Comédie dramatique, 1h46, distribué sur 64 copies) avec Grant Rosenmeyer, Hayden Szeto et Ravi Patel
Nobody de Ilya Naishuller (États-Unis, Action, 1h35) avec Bob Odenkirk, Connie Nielsen et Christopher Lloyd
Les Ours gloutons de Alexandra Hetmerova et Katerina Karhankova (Tchéquie, Animation, 0h42)
Petite maman de Céline Sciamma (France, Drame familial, 1h12, distribué sur 157 copies) avec Josephine Sanz, Gabrielle Sanz et Nina Meurisse
Playlist de Nine Antico (France, Comédie, 1h26, distribué sur 103 copies) avec Sara Forestier, Laetitia Dosch et Pierre Lottin
Les Séminaristes de Ivan Ostrochovsky (Slovaquie, Drame religieux, 1h20) avec Vlad Ivanov, Martin Sulik et Milan Mikulcik
Suzanna Andler de Benoît Jacquot (France, Drame, 1h35) avec Charlotte Gainsbourg, Niels Schneider et Julia Roy
Villa Caprice de Bernard Stora (France, Thriller, 1h43, distribué sur 354 copies) avec Niels Arestrup, Patrick Bruel et Michel Bouquet
Reprises
Rétrospective Abbas Kiarostami en 13 films et 7 courts-métrages (1970-2002) de Abbas Kiarostami (Iran, distribué sur 20 copies)
The Amusement Park (1973) de George A. Romero (États-Unis, Horreur, 0h53, distribué sur 15 copies) avec Lincoln Maazel, Harry Albacker et Phyllis Casterwiler
Juliette ou la clef des songes (1950) de Marcel Carné (France, Drame fantastique, 1h46, distribué sur 3 copies) avec Gérard Philipe, Suzanne Cloutier et Jean-Roger Caussimon