Pour diverses raisons, la Chine n’a pas vraiment bonne presse en ce moment en Europe en général et en France en particulier. Et inversement, que pensent les Chinois des Français ? Que savent-ils de nous ? Afin de maintenir un échange culturel constructif, Unifrance, l’organisme chargé de la promotion du cinéma français à l’international, organise depuis le début du siècle son Panorama en Chine. Dans cet immense pays au marché du cinéma toujours assez bien portant depuis la réouverture des salles fin juillet, les productions étrangères ont en effet du mal à se faire leur petite place. Initialement prévue pour le mois de juin mais repoussée à cause de la crise sanitaire du coronavirus, la 17ème édition du Panorama du Cinéma Français en Chine s’est ouverte hier à Pékin. Elle voyagera ensuite jusqu’à la mi-janvier 2021 dans dix villes chinoises, dont Chengdu, Shanghai et Wuhan.
Tandis que l’ambassadeur du festival, l’acteur et producteur chinois Huang Xiaoming (Un grand voyage vers la nuit de Bi Gan), a bien été fait chevalier des Arts & Lettres par l’ambassadeur français en Chine lors de la cérémonie d’ouverture, d’autres aspects de ce festival promotionnel se sont avérés plus problématiques cette année. Car la semaine dernière, il disposait encore d’une marraine en la personne de l’actrice française Juliette Binoche, présente sur le matériel de communication de l’événement. On ne peut qu’émettre des hypothèses sur les raisons de son retrait de cette fonction symbolique. Scrupules politiques pour cette personnalité très engagée dans toutes sortes de causes humanitaires et écologiques ou bien d’autres obligations professionnelles ? Mystère ! Toujours est-il que l’organisation de ce type de festival, comme en Allemagne la semaine dernière ou au Japon à partir de jeudi prochain, se passe généralement de façon plus fluide pour Unifrance.
Quel type de films les spectateurs chinois sont-ils censés apprécier ? Le programme de cette édition s’annonce assez hétéroclite à la fois en termes d’ancienneté des films et de leurs genres respectifs. Sur les huit titres retenus, deux n’ont ainsi pas encore eu l’honneur d’une sortie en salles en France. Alors que ce n’est plus qu’une question de semaines pour Un triomphe de Emmanuel Courcol, encensé depuis sa sélection au Festival de Cannes qui n’a pas eu lieu, on attend toujours en vain qu’un distributeur veuille bien s’occuper de A l’abordage de Guillaume Brac. La sortie sur les écrans français qui remonte le plus en arrière serait Sibyl de Justine Triet, distribué en parallèle de sa présentation en compétition au Festival de Cannes en 2019.
Sinon, les vedettes mondialement connues du cinéma français comme Catherine Deneuve – à deux reprises, rien que ça ! – et Daniel Auteuil côtoient ici les talents de demain de notre production nationale, comme le jeune espoir du cinéma d’animation Jérémy Clapin. On notera tout de même l’absence de quelques grands succès prestigieux de ces douze à dix-huit derniers mois, comme ceux qui avaient trusté la cérémonie des César l’hiver dernier (Les Misérables de Ladj Ly, Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma et J’accuse de Roman Polanski). Comme quoi les films au potentiel socialement engagé sont toujours aussi peu les bienvenus sur le territoire chinois, passablement cadenassé.
La sélection 2020 du Panorama du Cinéma Français en Chine
A l’abordage de Guillaume Brac, avec Eric Nantchouang et Salif Cissé, sans date de sortie en France
La Belle époque de Nicolas Bedos, avec Daniel Auteuil et Guillaume Canet
Fête de famille de Cédric Kahn, avec Catherine Deneuve et Emmanuelle Bercot
J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin
Le Sel des larmes de Philippe Garrel, avec Logann Antuofermo et Oulaya Amamra
Sibyl de Justine Triet, avec Virginie Efira et Adèle Exarchopoulos
Un triomphe de Emmanuel Courcol, avec Kad Merad et David Ayala, sortie française le 20 janvier 2021
La Vérité de Hirokazu Kore-Eda, avec Catherine Deneuve et Juliette Binoche