Critique : Fritzi

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Fritzi

Allemagne : 2019
Titre original : Fritzi – Eine Wendewundergeschichte
Réalisation : Ralf Kukula, Matthias Bruhn
Scénario : Beate Völcker, Péter Palátsik d’après le livre pour enfants de Hanna Schott et Gerda Raidt
Distribution : Septième Factory
Durée : 1h26
Genre : Animation, historique
Date de sortie : 7 juillet 2021

3/5

Tous deux cinquantenaires, les réalisateurs Ralf Kukula et Matthias Bruhn ont vécu différemment la fin de l’Allemagne de l’est. En effet, Ralf Kukula est originaire de Dresde et il a vécu directement des évènements tels que ceux racontés dans Fritzi. Matthias Bruhn, lui, est originaire l’Allemagne de l’ouest et il a suivi ces évènements au travers des médias. Ils ont eu l’idée, dès 2010, de réaliser un film s’inspirant du livre de Hanna Schott et Gerda Raidt, alors qu’il était encore en préparation. Un problème à surmonter, toutefois : sa longueur ne permettait pas la réalisation d’un long métrage. De nombreux éléments sont donc venus s’ajouter à l’histoire originelle.

Synopsis : Leipzig, Allemagne de l’Est, 1989. Pendant l’été, Sophie, la meilleure amie de Fritzi part en vacances en lui confiant son chien adoré, Sputnik. A la rentrée des classes, Sophie est absente et sa famille a disparu. Avec Sputnik, Fritzi entreprend de traverser clandestinement la frontière pour retrouver celle qui leur manque tant. Une aventure dangereuse… et historique

1989 en Allemagne 

Leipzig, République Démocratique allemande (ou, si vous préférez, Allemagne de l’Est), 1989 : Fritzi, 12 ans, est la meilleure amie de Sophie. Toutes deux sont élèves dans un collège de la ville, mais les moments qu’elles préfèrent, ce sont ceux qu’elles passent dans une cabane située dans un arbre, juste en face de l’appartement où vivent Sophie et sa mère, une cabane accessible par une planche installée entre l’arbre et la terrasse de cet appartement. Pas vraiment mécontentes de leur sort, elles échangent leurs interrogations sur la vie à l’ouest, ces pays où, parait il, on trouve des bananes et du vrai Coca-Cola. Julia et Kati, leurs mères respectives, entretenant d’excellents rapports, c’est tout naturellement que Sophie confie son chien Sputnik à Fritzi lorsqu’elle part en vacances en Hongrie avec sa mère. Pour Fritzi, le temps est long sans la présence de Sophie, et encore plus lorsque, à la rentrée, Sophie n’est pas revenue. Aucun doute : en allant en Hongrie avec Sophie, Kati avait une idée en tête, fuir la RDA pour aller à l’ouest. Une idée contre laquelle Sophie, si elle l’avait connue, se serait sans doute opposée. En tout cas, elle n’aurait pas laissé Sputnik à Leipzig ! Mais la rentrée de septembre 1989, c’est aussi le moment précis où les manifestations du lundi organisées à Leipzig, en faveur de la liberté de penser et de se rassembler, prennent une très grande ampleur, des manifestations dans lesquelles Fritzi va s’impliquer avec son nouvel ami Bela. Les choses changent, et, pour Fritzi, nait l’espoir de pouvoir ramener Sputnik à son amie Sophie.

Pour les enfants, si possible avec leurs parents

Fritzi est un film d’animation destiné aux enfants entre 8 et 12 ans. Aujourd’hui, même en Allemagne et a fortiori en France, ce qui a commencé à se passer outre-Rhin en 1989 et qui s’est conclu par la réunification du pays est très nébuleux pour les enfants de cet âge. Ralf Kukula et Matthias Bruhn ont pensé que la connaissance de ces évènements était importante pour ces enfants et qu’elle leur permettrait, entre autre, de mieux comprendre le monde d’aujourd’hui. Ils ont choisi de mettre en scène deux jeunes adolescentes de 12 ans, à peu près l’âge qu’avaient à l’époque les parents des spectateurs et spectatrices visé.e.s par eux. Un choix qui devrait permettre aux parents qui verront le film avec leurs enfants de raconter leur propre expérience de cette période.

C’est à Leipzig que vivent Fritzi et Sophie, un choix qui ne doit rien au hasard, cette ville, la 2ème de RDA par sa population, ayant été à l’origine des « manifestations du lundi », qui ont fini par déboucher sur la chute du mur de Berlin et la réunification allemande. Le couple formé par Julia et Klaus, les parents de Fritzi, fait partie de la classe moyenne, tout comme Kati, la mère de Sophie. Mise à part l’absence de « véritable coca-cola » et de bananes, matériellement, leur existence semble exempte de souci particulier : on a sa voiture (une Trabant, bien sûr), on peut aller passer des vacances dans la Hongrie voisine, des camps de vacance sont organisés pour les enfants. Si Kati prend le risque de tenter le passage à l’ouest avec sa fille, Julia et Klaus sont au début très réticent.e.s à s’engager dans le camp de la contestation. En fait, ce que montre le film sur les raisons d’insatisfaction d’une partie importante de la population est relatif à la liberté, la liberté de penser, la liberté de se réunir, ainsi qu’aux représailles qui étaient de mise si l’on s’écartait de la « ligne » officielle. Le film met l’accent sur les actions de la Stasi et, surtout, sur l’endoctrinement à l’école, avec un personnage important, Mme Liesegang, une professeure qui sanctionne durement toute tentative de rébellion, individuelle ou collective. 

La ligne claire

Pour réaliser leur film, Ralf Kukula et Matthias Bruhn ont pris l’option de la 2D et, graphiquement, de ce qu’on a coutume d’appeler la « ligne claire ». L’architecture de la ville, les véhicules et les personnages sont représenté.e.s de façon à la fois simple et réaliste ce qui permettra aux jeunes spectateurs de mieux s’identifier à Fritzi et Sophie. S’agissant d’un film destiné à un jeune public, on ne jouera pas les puristes en regrettant ostensiblement que le film ne soit pas présenté en version originale, d’autant plus que les intonations des comédien.ne.s qu’on entend sont pleines de fraîcheur et de spontanéité.

Conclusion

Surtout destiné aux enfants entre 8 et 12 ans, Fritzi peut se voir en famille, ce qui ne manquera pas de générer une discussion sur ce qu’il montre. Esthétiquement agréable à regarder, ce film donne sans exagération une vision honnête de ce qu’était la vie en RDA en 1989.

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