Mystery Men
États-Unis : 1999
Titre original : –
Réalisateur : Kinka Usher
Scénario : Neil Cuthbert
Acteurs : Ben Stiller, Hank Azaria, William H. Macy
Éditeur : L’atelier d’images
Durée : 2h01
Genre : Comédie, Fantastique
Date de sortie cinéma : 15 décembre 1999
Date de sortie DVD/BR : 21 juillet 2020
M. Furieux, le Fakir bleu et La Pelle, trois super-héros de seconde zone, ont enfin l’opportunité de se faire connaître quand Capitaine Admirable, le héros de Champion City, est fait prisonnier par son ennemi mortel, Casanova Frankenstein…
Le film
[4/5]
Cuisant échec dans les salles à sa sortie en 1999, Mystery Men est un film qui, à l’image de Fatal games (Heathers, 1989) ou encore Va te faire foutre Freddy ! (Freddy got fingered, 2001), a peu à peu glané ses galons de film-culte suite à son exploitation en vidéo et à la télévision. Il faut avouer également qu’au moment de sa sortie, l’explosion des films de super-héros autour de l’écurie Marvel n’avait pas encore eu lieu – les Spider-Man de Sam Raimi n’avaient pas encore vu le jour. Le film de Kinka Usher précédait également de presque dix ans la création de l’univers cinématographique Marvel (ou MCU), qui débuterait seulement en 2008 avec Iron Man.
De fait, et même si la Marvel-isation des esprits rend presque cet état de fait quasiment inconcevable de nos jours, il semble bien qu’au moment de sa sortie, Mystery Men s’imposait comme un film « de niche », destiné aux amateurs de super-héros, soit clairement à un public de « geeks ». Mais on vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre, un temps où être geek n’était pas encore à la mode et où il était socialement mieux accepté d’être fan de Jean-Claude Van Damme que de suivre les exploits de types en collants. Le monde d’avant.
Mystery Men est donc sorti quelques années trop tôt – à une époque où les codes du film de super-héros n’étaient pas encore connus de tous. Un film anachronique en somme… Mais contrairement à tous ces films contemporains qui s’échinent à recycler les recettes du passé (à la Black Panther !), le film de Kinka Usher était quant à lui en avance sur son temps. Un précurseur dans son domaine, préfigurant les flopées de super-héros / bras cassés qui débarqueraient bien plus tard sur nos écrans, de The boys aux Gardiens de la galaxie en passant par Hancock, Kick-Ass ou Deadpool… Sans même compter les français de Hero Corp, qui doivent également sans doute beaucoup aux Mystery Men.
De nos jours cependant, le film de Kinka Usher s’est largement vu réhabilité, au point que de nombreux cinéphiles en connaissent quelques répliques par cœur et/ou s’amusent ponctuellement à laisser monter leur colère à la façon de Mr Furieux ou à imiter l’accent de Casanova Frankenstein. Und ! Qui l’eut cru en 1999 ? Pour autant, si le film a fini par gagner ses lettres de noblesse, on n’en connait pas mieux les origines de ces fameux Mystery Men. Beaucoup ignorent par exemple que le scénario du film est adapté d’une série de comic-books. Très librement, mais adapté quand même.
Les Mystery Men sont donc une équipe de super-héros issus de l’univers Dark Horse Comics. Apparus à l’origine en tant que personnages secondaires dans les Flaming Carrot Comics de Bob Burden, ils sont par la suite intervenus dans d’autres séries – ils ont notamment fait équipe à plusieurs reprises avec les Tortues Ninja – puis dans leur propre série de comics. Assez confidentielle (surtout en France), la série ne parlera qu’à cette petite poignée d’élus, littéralement triés sur le volet, qui composaient la petite niche de « geeks comics » dans les années 90. Des comics originaux, le scénariste Neil Cuthbert (à l’occasion secondé par Bob Burden) n’a conservé que quelques personnages aux pouvoirs insolites. Et surtout, l’équipe artistique a fait le choix de plonger le tout dans un univers baroque, post-moderne et extrêmement stylisé, à la fois bourré de couleurs et de néons mais proposant dans le même temps quelques éléments Art-Déco. Comme si l’esthétique de Blade Runner se confrontait au Gotham City de Tim Burton, le tout surmonté d’une touche de couleurs kitsch et pop.
Mais tout Mystery Men sera finalement à l’avenant de cette esthétique fourre-tout, puisque le film ne navigue pas forcément non plus clairement dans les eaux de la parodie pure, mais plutôt du pastiche, proposant au final un regard étrange, moqueur mais tendre, sur diverses conventions du genre de super-héros. Une désacralisation du genre avant l’heure, montrant notamment les interactions entre super-héros dans la vie de tous les jours. Dans l’absolu, et puisque le film s’impose comme un récit de super-héros qui en détourne certains codes sans pour autant jamais réellement les tourner complètement en ridicule ou s’en détacher totalement, on pourrait le rapprocher de séries de comics telles que celles tournant, chez Marvel, autour d’Howard le canard, ou encore de Captain Carrot and his amazing zoo crew (1982-1983) de Roy Thomas et Scott Shaw, sorti chez DC Comics et ayant bénéficié de quelques numéros en français chez Artima en 1983 sous le titre Captain Carotte.
Tantôt stupide tantôt vraiment malin, Mystery Men s’impose dès lors comme une excellente comédie, formellement ambitieuse, remplie de gags efficaces et de trouvailles hilarantes, dont l’impact sera encore renforcé par une mise en scène réellement inventive à mettre au crédit de Kinka Usher, qui par moments prend réellement le parti de s’éclater avec sa caméra. Und ! de nous proposer par conséquent une poignée de punchlines et de séquences tout entières qui se poseront comme quasi-immédiatement anthologiques.
Un peu plus de vingt ans après sa sortie, ce qui surprendra à coup sûr les spectateurs contemporains à la découverte de Mystery Men, c’est son casting exceptionnel. Pour les rôles importants, on dénote Ben Stiller, William H. Macy, Hank Azaria, Greg Kinnear, Geoffrey Rush, Tom Waits dans la peau d’un savant fou, Janeane Garofalo, Eddie Izzard, Claire Forlani ou encore Paul Reubens, surtout connu pour avoir longtemps incarné le personnage de Pee-Wee Herman au cinéma et à la télévision, et accessoirement pour s’être fait arrêter en train d’astiquer popaul dans un cinéma porno en 1991.
Mais Mystery Men comporte aussi son lot de caméos, ou d’apparitions « clin d’œil » au spectateur :
– le magicien Ricky Jay, qui s’offrira une fameuse réplique « I’m not a magician »
– Dane Cook dans le rôle du Waffler aka « Le gaufrier »
– Doug Jones, connu pour ses nombreux rôles de « créatures » dans le cinéma de Guillermo Del Toro, qui se paye ici le rôle de Pencilhead
– le cinéaste Michael Bay en président de fratrie maléfique
– le rappeur Cee-Lo Green également en chef de gang
Le Combo Steelbook Blu-ray + DVD
[4,5/5]
Annoncée puis repoussée depuis plus d’un an, victime collatérale du « Grand Confinement », cette édition Combo Blu-ray + DVD de Mystery Men chez L’atelier d’images a la particularité de s’être fait attendre. Mais qu’importe la destinée contrariée de ce bel objet : grâce à la participation financière de nombreux internautes via une campagne de crowdfunding, Mystery Men débarque finalement bien aujourd’hui dans nos mains fébriles. Et c’est bien là l’essentiel. Un Blu-ray + un DVD, le tout étant présenté sous la forme d’un Steelbook illustré par Paul Shipper : la classe américaine pour un bel objet de collection.
Et le Blu-ray, ça dit quoi alors ? Depuis l’annonce de la mise en chantier de cette édition, l’inquiétude était de rigueur. Car comme les amateurs de galettes Haute-Définition le savent bien, le fait que Mystery Men soit un film des années 90 issu du catalogue Universal Pictures n’augurait rien de spécialement bon du côté du master. Ainsi, on ne sera guère étonné au visionnage du Blu-ray de constater que Mystery Men compte encore nombre de stigmates des éditions Universal en termes de rendu HD. En effet, malgré la belle précision de l’ensemble et une colorimétrie solide, revue et corrigée à la hausse depuis l’antique édition DVD, on ne pourra s’empêcher de tiquer par moments devant le transfert du film, qui affiche de légères traces de passage au réducteur de bruit (DNR), et imposant quelques textures à l’aspect numérique laissant un peu à désirer. Le grain est présent, sans atténuation majeure – on remarque cependant un peu de Edge Enhancement sur certains plans, cette amélioration artificielle des contours provoquant lors de certaines séquences un léger halo blanchâtre autour des personnages. Cela dit, et malgré ces quelques réserves, la galette propose un rendu globalement enthousiasmant, très supérieur à n’importe quelle source SD, surtout si vous visionnez le film sur un très grand écran. On notera par ailleurs que le film est bel et bien proposé en 1080p. Côté son, l’éditeur nous propose deux mixages (VF / VO) dynamiques et spectaculaires, en DTS-HD Master Audio 5.1. Le rendu est cartoonesque et sympathique, avec de petits détails sonores parfois étonnants sur les canaux arrière. Les deux mixages sont clairs, propres et bien équilibrés : du très beau travail.
Du côté des suppléments, qui dit édition collector dit forcément bonus soignés et nombreux, et à ce niveau-là, L’atelier d’images remplit parfaitement sa part du contrat. On retrouvera et on survolera les suppléments déjà disponibles sur l’édition DVD du film, également proposés ici en définition standard mais « upscalé ». On commencera tout d’abord avec un commentaire audio de Kinka Usher (VOST), enregistré à l’époque de la grande folie des commentaires audio au début des années 2000, alors qu’on en enregistrait même lorsque l’on n’avait rien à dire. De fait, le cinéaste se contentera de distiller quelques informations intéressantes, notamment sur les marques apparaissant dans le film ou sur les scènes qu’il a dû couper au montage (dont beaucoup seront incluses dans la section ad hoc). On notera une anecdote amusante concernant les parents de Ben Stiller, Anne Meara et Jerry Stiller, venus visiter le plateau. On continuera ensuite avec une dizaine de scènes coupées (20 minutes), qui donneront d’avantage d’informations sur la vie de tous les jours de la Pelle et du Fakir bleu ou nous donneront à voir la version originale (sans effets spéciaux) de la destruction du psycho-frakulateur. Pour terminer, on aura également le droit à une bande-annonce d’époque et à une featurette sur les coulisses du tournage (18 minutes), qui nous proposera quelques moments volés sur le tournage entrecoupés d’interventions de la plupart des acteurs principaux. Voilà pour les bonus « d’époque » (on prend vraiment un sacré coup de vieux), place maintenant aux bonus inédits, tous proposés en Haute-Définition.
On commencera direct dans le vif du sujet avec un entretien avec Kinka Usher, réalisateur (« Nous sommes les autres gars », 24 minutes), au cœur duquel le cinéaste reviendra sur sa carrière dans la pub et son arrivée au cinéma, son travail sur le scénario, le choix des acteurs, etc. Au final, il semble plutôt satisfait de son film, notamment d’avoir réussi à réellement mettre les personnages au centre du film, et d’avoir privilégié les effets spéciaux réalisés sur le plateau. En revanche, il regrette amèrement qu’Universal n’ait pas cru dans le succès de Mystery Men. On poursuivra avec un entretien avec Marilyn Vance, costumière (« Je suis un super-héros, maman », 12 minutes), qui reviendra, croquis préparatoires à l’appui, sur le style de quelques-uns des personnages principaux, puis avec un court entretien avec Todd Tucker, responsable des effets spéciaux (« Champion City en son et lumière », 9 minutes), qui évoquera également le design et les maquillages nécessaires aux personnages incarnés par Greg Kinnear et Paul Reubens.
On continuera ensuite avec un entretien avec Daniel Schweiger, historien de la musique de film (« Le Disco, c’est la vie », 8 minutes). Si on ignorait qu’il existait des historiens spécialisés dans les bandes originales de films, il faudra admettre que ce sujet, qui confronte la musique décalée créée pour le film par Stephen Warbeck et les ajouts de Shirley Walker, habituée des superhéros à l’époque, qui a « gonflé » l’ensemble avec une demi-heure de musique plus épique et traditionnelle. Le résultat est en effet assez unique ! Enfin, on terminera le tour des suppléments avec une présentation du film par Quentin Durand, , également connu sous le pseudonyme du « stagiaire des affiches » et créateur de « The 90’s movie club » (11 minutes). Globalement assez intéressant, son propos manque néanmoins de clarté. Si bien sûr son érudition et son langage à la cool permettent au sujet de passer relativement vite, on ne peut s’empêcher de penser qu’il aurait du d’avantage préparer sa présentation, et surtout à l’écrire, ce qui lui aurait permis d’organiser ses idées et de ne pas partir dans tous les sens, passant du coq à l’âne en utilisant parfois des expressions d’un autre temps (« péter tous les potards », vraiment ?). Cependant, on ne peut pas lui retirer une certaine cohérence, dans le sens où le fait d’aller dans tous les sens sans réussir à canaliser sa pensée est précisément ce qu’il reproche à Mystery Men.
Les plus curieux auront également l’occasion de trouver en bonus (pas très bien) caché la vidéo d’annonce du projet de crowdfunding sur Kiss Kiss Bank Bank, ainsi qu’une poignée de bandes-annonces de films disponibles en Blu-ray chez L’atelier d’images : Les aventures de Jack Burton dans les griffes sur mandarin, Darkman, Evil Dead et Rollerball.