Test Blu-ray : Patrick

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1997

Patrick

Australie : 1978
Titre original : –
Réalisation : Richard Franklin
Scénario : Everett De Roche
Acteurs : Susan Penhaligon, Robert Helpmann, Robert Thompson
Éditeur : Rimini Éditions
Durée : 1h52
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 9 mai 1979
Date de sortie DVD/BR : 6 mars 2020

Kathy Jacquard, une jeune infirmière, est embauchée dans une clinique privée australienne. Parmi les malades, il y a Patrick, 24 ans, dans le coma depuis plusieurs années. Bien des employés ont songé à le « débrancher », mais nul n’a osé. Intéressée par son cas, Kathy découvre que, s’il a perdu l’usage de ses cinq sens, Patrick en a développé un sixième, fascinant et redoutable. Du fond de son lit, il est capable de changer le cours des choses. La multiplication d’événements étranges met la clinique sous haute tension…

Le film

[4/5]

Le cinéma d’exploitation australien – ou « Ozploitation » – est un sous-genre qui, en France, peine un peu à percer et à être reconnu à sa juste valeur. Cependant, bien avant le fameux documentaire Not quite Hollywood : The wild, untold story of Ozploitation ! (2008), le cinéma populaire australien avait déjà bénéficié d’un coup de projecteur tout particulier en France, sous l’impulsion du magazine Mad Movies. En effet, à partir de 2002, la revue dédiée au cinéma fantastique s’était vue accompagnée d’un DVD dans les kiosques, et des films australiens un peu oubliés et jusqu’alors inédits en DVD avaient de ce fait pu être redécouverts par un large public.

Patrick fut le tout premier film de cette vague. 18 ans plus tard, ce petit classique du fantastique australien bénéficie d’une nouvelle vie en Blu-ray grâce à Rimini Éditions, qui permettra aux plus jeunes d’entre nous de le découvrir, et aux plus âgés de le revoir dans des conditions inédites. Ecrit par Everett de Roche (Long week-end, Harlequin, Déviation mortelle, Link, Razorback… en voilà un qui avait la mainmise sur le genre à l’époque !) et réalisé par Richard Franklin en 1978, Patrick a remporté, à l’époque de sa sortie, un beau – et mérité – succès international. A une époque où cinéma d’épouvante rimait encore souvent avec ambiances gothiques, le film de Franklin tirait les leçons de L’exorciste et surtout des premiers films fantastiques de Brian De Palma (Furie, Carrie au bal du diable) afin de nous livrer un très efficace film de terreur, très contemporain et fortement teinté de frustrations sexuelles, que l’on pouvait classer aux côtés des premiers films du canadien David Cronenberg, Rage et Frissons.

Ainsi, si le film de Richard Franklin était depuis retombé dans un oubli relatif, Patrick mérite clairement d’être redécouvert. L’intérêt du film vient en partie de la gageure d’un scénario basé sur un personnage qui demeure immobile et muet durant tout le récit, allongé sur son lit d’hôpital. Patrick, car c’est bien de lui dont on parle, est considéré comme cérébralement mort, et évolue dans un monde « intérieur », quelque part entre la vie et la mort – son visage figé aux yeux exorbités contribue déjà, à lui seul, à insuffler au métrage une vague impression de malaise et de fantastique, qui permettra finalement au film d’évoluer à son propre rythme, lent mais indéniablement oppressant. Durant les deux premiers tiers du métrage, le scénario d’Everett de Roche nous proposera de nous familiariser avec Kathy, jeune infirmière que l’on découvrira aussi terrorisée que profondément attirée par la sexualité – elle trouvera avec Patrick, symbole de passivité, le courage de prendre l’initiative, de toucher, de découvrir… De prendre en main sa sexualité en somme – sans mauvais jeu de mot. D’étranges relations de complicité mêlée de trouble se nouent donc entre l’infirmière et son malade, qui, toutes proportions gardées, évoqueraient presque le sublime Johnny s’en va-t-en guerre (Dalton Trumbo, 1971).

Mais ne nous leurrons pas : on baigne ici dans le fantastique pur, et le soin apporté par Richard Franklin à la description de la lente évolution des relations entre Kathy et Patrick et la façon dont celle-ci s’avère parsemée d’événements surnaturels ne feront en réalité que préparer le terrain pour le dernier acte du métrage. Puissant, inattendu, rompant clairement avec la sobriété – et la douceur presque – de ce qui a précédé, ce final qui consiste en une explosion des forces occultes traitée avec un amour immodéré des scènes-choc et du Grand Guignol laissera à coup sûr le spectateur pantois, tout en lui laissant quelques images à jamais gravées dans l’esprit. Des images fortes, durables, qui impressionneront tant certains spectateurs que la suite du film, intitulée Le retour de Patrick, mise en scène par Mario Landi en 1980, jouerait quant à lui à fond la carte du Grand Guignol, multipliant les excès en tous genres en termes de gore et de sexe, avec notamment une scène de viol voyant sa victime transpercée avec un tisonnier…

Le Blu-ray

[4/5]

Patrick arrive donc en France sur support Haute-Définition ce mois-ci, sous les couleurs de Rimini Éditions, qui enrichit de fait sa belle collection dédiée au cinéma fantastique des années 70/80. Côté Blu-ray, la définition est précise, les couleurs riches et bien saturées, les noirs sont globalement bien gérés, et la restauration a pris soin de préserver le grain argentique d’origine. Les plans « à effets » et les séquences nocturnes ou en basse lumière affichent certes un grain un peu plus épais, mais mieux vaut cela qu’un lissage outrancier – d’autant que le reste est vraiment d’une propreté et d’une stabilité tout à fait étonnantes. Vous pouvez donc mettre au rebut votre DVD de 2002 sans le moindre regret ! Côté son, VF et VO sont proposées en LPCM 2.0. La version originale est parfaitement équilibrée, sans souffle et vous plongera à coup sûr de façon très efficace dans le film de Richard Franklin. Le désuet doublage français d’origine est quant à lui mixé à un niveau plus bas que son homologue dans la langue de Shakespeare, et accusera un peu plus nettement des outrages du temps. Certains passages, probablement coupés lors de la sortie du film en France, seront proposés en VO. D’une façon amusante, on notera également que la version française semble vouloir atténuer certains éléments du métrage : ainsi, « Patrick is waiting for his hand job », que l’on pourrait traduire littéralement par « Patrick attend sa branlette » sera fort bizarrement traduit dans la VF par « Patrick attend son heure » ! On ne saurait donc trop vous conseiller de visionner le film dans sa langue d’origine.

Du côté des suppléments, on commencera avec l’indispensable livret de 20 pages consacré au film, comme toujours signé Marc Toullec, qui reviendra sur la genèse du film de façon très complète, en citant énormément les propos d’Everett de Roche et Richard Franklin, qui évoquent les différentes moutures successives d’un scénario qui, à l’origine, faisait rien de moins que 250 pages. On poursuivra ensuite avec un entretien avec Richard Franklin (25 minutes), probablement enregistré au début des années 80 pour la TV australienne. Ce document nous donnera une idée un peu plus précise aperçu de la formation et de la carrière d’un cinéaste finalement assez peu connu chez nous, qui s’exprimera également sur ses travaux à la télé, notamment sur la série Homicide. Il abordera ensuite sa carrière au cinéma sur Le lagon bleu et sur Déviation mortelle. Patrick bien sûr ne sera pas laissé de côté, le cinéaste y évoquant notamment son approche du suspense, héritée d’Alfred Hitchcock. Le tout est largement entrecoupé d’extraits. Cet entretien sera complété par un autre entretien avec Richard Franklin, réalisé durant le tournage du film (9 minutes), qui nous donnera également à voir quelques moments volés sur le plateau.

On terminera avec un montage d’entretiens avec le réalisateur Richard Franklin, le producteur Anthony I. Ginnane, le scénariste Everett de Roche et la comédienne Susan Penhaligon (61 minutes). Il s’agit de rushes d’entretiens issus du tournage du film documentaire Not quite Hollywood (2008) qu’on évoquait en tout début d’article. Les anecdotes s’y succèdent sur un rythme soutenu : on reviendra pêle-mêle sur le remontage / redoublage du film aux États-Unis, sur les différents défis tournant autour du fait que le personnage central soit muet et immobile… On appréciera tout particulièrement les interventions de Susan Penhaligon, particulièrement naturelle, et d’Everett de Roche, disparu en 2014. Pour la petite histoire, on notera également que le documentaire Not quite Hollywood a été réalisé par Mark Hartley, cœur à vif et cinéaste dont le destin serait par la suite étroitement lié à Patrick : il réaliserait en effet le remake du film de Richard Franklin en 2013. Malgré les propos de Marc Toullec dans le livret, il s’agit d’un remake formellement très soigné et tout à fait fréquentable, même s’il n’égale en aucune façon l’original. On terminera le tour des bonus avec la traditionnelle bande-annonce et un spot TV.

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