Terror train – Le monstre du train
Canada : 1980
Titre original : Terror train
Réalisation : Roger Spottiswoode
Scénario : T.Y. Drake
Acteurs : Jamie Lee Curtis, Ben Johnson, Hart Bochner
Éditeur : Rimini Éditions
Durée : 1h37
Genre : Horreur
Date de sortie cinéma : 17 juin 1981
Date de sortie DVD/BR : 4 janvier 2020
Afin de fêter comme il se doit la nouvelle année, un groupe d’étudiants organise un réveillon costumé dans un train à vapeur. Entre drogues, alcool, danse et divertissements, la soirée promet d’être animée. Mais un tueur s’est introduit dans le train…
Le film
[3,5/5]
Pour la plupart des cinéphiles, le nom de Roger Spottiswoode est automatiquement associé à une certaine idée, populaire et généreuse, du cinéma d’action. Monteur de Sam Peckinpah et Walter Hill, ayant été révélé au grand public en signant le scénario de 48 heures de Walter Hill, il reviendrait en effet régulièrement au blockbuster orienté « action familiale » tout au long de sa carrière, avec des films tels que Turner et Hooch (1990), Arrête ou ma mère va tirer (1992) ou encore le JezBond Demain ne meurt jamais (1997). Et s’il a abordé de nombreux genres en 40 ans de cinéma, on oublie cependant souvent que Roger Spottiswoode a fait ses premières armes sur un film d’horreur : Le monstre du train, petite production canadienne ayant su profiter au bon moment de la popularité soudaine de Jamie Lee Curtis. Révélée par le Halloween de John Carpenter en 1978, la jeune actrice avait en effet durant quelque temps suivi la voie de l’horreur, avec trois films en 1980 – Fog, Le bal de l’horreur et Le monstre du train – et deux en 1981 – Déviation mortelle et Halloween II.
Slasher adolescent extrêmement classique dans son déroulement autant que dans sa conception, Le monstre du train affiche tout de même quelques petites originalités. La première d’entre-elles est de se dérouler dans un train bien-sûr – un vieux train à vapeur évoquant bien sûr les grandes heures de l’Orient Express. Le train utilisé pour le film de Spottiswoode n’a certes en aucun cas la classe de l’Orient Express, tout comme le scénario n’a rien à voir avec un mystère à la Agatha Christie. Le décor aurait par ailleurs probablement pu être mieux exploité, mais on avouera tout de même néanmoins que ce cadre est clairement inhabituel, qu’il créée par moments un singulier sentiment de claustrophobie, et qu’il s’agit là d’une idée intéressante. Deuxième originalité à mettre au crédit du Monstre du train : celle de mettre en scène, en parallèle avec la classique intrigue de type « slasher », une série de numéros de magie, assurés par le ténébreux David Copperfield, dont la popularité exploserait dans les années 90 suite à sa relation surmédiatisée avec le top-model Claudia Schiffer. Si bien sûr le montage ainsi que le choix des plans tend forcément à biaiser ce genre de tours, dans le sens où tous les soupçons de « tricherie » sont permis, les amateurs de magie seront aux anges, d’autant que les tours de David Copperfield sont efficaces et parfaitement exécutés.
Mais la principale originalité du film de Roger Spottiswoode est peut-être bien de nous donner à voir, dans les vingt premières minutes du récit, un groupe de jeunes gens qui seront certes présentés comme les héros, mais aussi et surtout comme une bande de petits fils à papa « pourris-gâtés » absolument antipathiques. Habile, le scénario prend le temps de nous les détailler les uns après les autres à l’issue d’une première scène de « trauma originel » où ils apparaissaient sous leur jour le plus négatif. Et si l’on excepte le personnage incarné par Jamie Lee Curtis, avec qui les auteurs sont peut-être un poil plus humains, aucun d’entre eux ne trouvera réellement grâce aux yeux du spectateur au fur et à mesure de l’évolution du récit, tant ces derniers semblent d’insensibles et cruels petits saligauds, n’ayant non seulement bien peu d’estime les uns pour les autres (les coups tordus de Doc vis à vis de Moe et Alana), mais faisant preuve également pour eux-mêmes de bien peu d’amour propre (Mitchy qui admet que Doc la trompe et finit par se jeter dans les bras d’un autre). Pour autant, l’incroyable se produit – le plus paradoxal et le plus étonnant à la découverte de ce Monstre du train est bel et bien que l’on finit malgré tout bel et bien par ressentir une certaine empathie vis à vis de ces raclures de bidet enclins aux blagues les plus cruelles. Grâce notamment à des dialogues bien écrits et à une caractérisation assez remarquable, ces personnalités nous apparaîtront au final aussi attachantes qu’elles sont repoussantes, ce qui permettra au film de maintenir une tension certaine durant toute sa durée.
Bien sûr, Le monstre du train est un slasher, et ce petit groupe de personnages sera finalement bel et bien puni pour ses actes passés : en 1980, la formule est déjà assez bien rodée et l’innovation n’a pas forcément sa place, même si on remerciera Spottiswoode et ses scénaristes de ne point trop tirer sur les « twists » à la Scooby-Doo en fin de métrage. Au final, le film se classerait même plutôt dans la fourchette « haute » du genre de l’époque : un solide petit slasher à redécouvrir !
Le Blu-ray
[4,5/5]
C’est Rimini Éditions qui nous propose aujourd’hui de découvrir Le monstre du train sur support Blu-ray, au sein de sa collection consacrée au cinéma fantastique : un pari éditorial que l’on salue bien bas. Le master proposé par l’éditeur est certes granuleux, mais correspond visiblement tout à fait aux volontés de Roger Spottiswoode et de son directeur photo John Alcott (collaborateur régulier de Stanley Kubrick), qui font baigner le film dans une ambiance surnaturelle. Le piqué est d’une belle précision, les noirs sont profonds, les contrastes remarquables, bref, tout est réuni pour (re)découvrir ce solide slasher dans les meilleures conditions possibles. Le film est mixé en DTS-HD Master Audio 2.0 d’origine à la fois en VF et en VO ; les amateurs de versions françaises délicieusement surannées se régaleront d’une époque où les camping-cars n’étaient pas encore connues dans l’hexagone et où on les appelait encore simplement « caravanes ».
Du côté des suppléments, on trouvera un très intéressant entretien avec Roger Spottiswoode (17 minutes) au cœur duquel le cinéaste se remémorera ses souvenirs du tournage : le planning très serré, les acteurs, sa collaboration étroite avec John Alcott… Passionnant et rempli d’anecdotes. On continuera ensuite avec un entretien avec la co-scénariste Judith Rascoe (6 minutes), non créditée au générique du film. Elle évoquera rapidement ses souvenirs du tournage à Montréal, l’influence d’Halloween sur le film, et nous offrira également de croustillantes anecdotes, sur la coiffeuse de Jamie Lee Curtis ainsi que sur David Copperfield, troublé par le fait qu’elle sortait à l’époque avec l’un de ses confrères magiciens. On terminera enfin avec un portrait de Jamie Lee Curtis (26 minutes) produit pour le câble US, que l’on avait pu découvrir il y a quelques années sur CanalSat. Last but not least, Rimini Éditions nous propose également un livret de 20 pages consacré à la genèse du film écrit par l’inusable Marc Toullec, et intitulé « Le monstre du train – La vie duraille ». On pardonnera à l’auteur ce jeu de mots déjà éculé dans les années 50 pour s’incliner devant le travail de recherche et de documentation remarquable dont il fait preuve.