Test DVD : Convoi exceptionnel

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Convoi exceptionnel

France, Belgique : 2019
Titre original : –
Réalisation : Bertrand Blier
Scénario : Bertrand Blier
Acteurs : Gérard Depardieu, Christian Clavier, Farida Rahouadj
Éditeur : Orange Studio
Durée : 1h20
Genre : Comédie
Date de sortie cinéma : 13 mars 2019
Date de sortie DVD : 17 juillet 2019

C’est l’histoire d’un type qui va trop vite et d’un gros qui est trop lent. Foster rencontre Taupin. Le premier est en pardessus, le deuxième en guenilles. Tout cela serait banal si l’un des deux n’était en possession d’un scénario effrayant, le scénario de leur vie et de leur mort. Il suffit d’ouvrir les pages et de trembler…

 

Le film

[4,5/5]

Depuis une trentaine d’années, et alors que les films de Bertrand Blier s’espacent de plus en plus dans le temps (rien de moins que neuf ans séparent Le bruit des glaçons de Convoi exceptionnel), il semble qu’un certain consensus critique se soit créé autour de chacun des nouveaux films du papa des Valseuses. Un consensus mou bien sûr, qui consiste à déclarer que le dernier film de Blier en date n’est pas « le meilleur de son auteur ». A vrai dire, il semble bien difficile de se prononcer sur ce point précis, tant l’œuvre de Bertrand Blier est unique et personnelle au sein du cinéma français : son écriture, ses obsessions formelles et thématiques, cette conception du cinéma indissociable de la personnalité de Blier semble se prolonger de film en film, chaque nouvelle œuvre se greffant aux précédentes, formant une nouvelle excroissance sur un « tout » où chaque film semble plus que jamais indissociable de tous les autres.

Aussi, le problème dans le fait de systématiquement comparer à Buffet froid les nouvelles œuvres de Bertrand Blier, c’est que cela tend à laisser penser que son cinéma est incapable de se renouveler depuis la fin des années 70 ; or ce n’est absolument pas le cas, chaque nouveau film s’imposant comme la nouvelle page d’un seul et unique « journal intime » dadaïste, à la fois libre, drôle, volontiers absurde, mais également profond, métaphysique, voire même parfois difficile d’accès.

Ne se posant plus aucune question du strict point de vue de la dramaturgie, Blier fera le choix avec Convoi exceptionnel de plonger directement le spectateur dans le bain, confrontant d’entrée de jeu Christian Clavier à son complice de toujours Gérard Depardieu. Et tout coule de source, facilement, la mise en scène et les mouvements de caméra typiques du cinéaste s’enchaînent de la même façon avec une aisance et un naturel extraordinaires. Par le dialogue, le scénariste / réalisateur fait dans l’auto-citation, avec des passages qui évoquent de façon claire certains de ses films précédents, certains acteurs / actrices – on pense surtout à une actrice en particulier ayant partagé sa vie dans les années 90, à qui l’auteur semble s’adresser par le biais de ses comédiens, par l’intermédiaire de ses mots dans la bouche des autres.

Comme dans Les côtelettes, Combien tu m’aimes et bien sûr Le bruit des glaçons, Blier soliloque, et continue d’évoquer dans ce Convoi exceptionnel les questions existentielles qui le taraudent, liées au sens de la vie, au destin, aux choix du passé, au libre arbitre… Et bien sûr à la mort, qui rôde dans tous ses films depuis 2003, même si, comme il le fait dire à Guy Marchand en fin de métrage, les acteurs sont « immortels ». On trouve au cœur du film une mélancolie si poussée qu’elle confine au désespoir, mais les amoureux de l’œuvre de Blier retrouveront avec la plus grande émotion la petite « musique » de ses mots, aux accents tragi-comiques et aux fulgurances poétiques et géniales qui font tout le sel de sa filmographie en forme de poupée-gigogne parfois imitée, mais jamais égalée (Michel Blanc, Alexandra Leclère…).

Le dossier de presse du film permettra par ailleurs de rassurer les inconditionnels de l’esprit « Bertrand Blier » : le scénariste / réalisateur, aujourd’hui âgé de 80 ans, ne compte pas arrêter le cinéma. « Je n’ai pas l’intention d’arrêter. J’en ai d’ailleurs un autre en écriture. J’ai beaucoup plus envie de tourner maintenant qu’il y a vingt ans. Vers 50 ou 60 piges, j’envisageais d’arrêter. Il y a eu l’aventure théâtrale avec Les côtelettes qui a été un gros choc, il y a eu les romans… Je pouvais (et peux encore) faire plein d’autres choses. Écrire des films pour d’autres, me mettre au service d’autres metteurs en scène qui en auraient besoin… Et continuer à faire des films dont on ne fait jamais complètement le tour parce qu’ils sont difficiles à cerner. Il faut penser au public à qui on montre toujours les mêmes choses… Il doit en avoir marre, le pauvre ! »

Le DVD

[4/5]

Convoi exceptionnel n’ayant malheureusement réuni qu’un peu moins de 123.000 spectateurs en France, le dernier film de Bertrand Blier ne verra le jour que sur support DVD, et n’aura pas le droit à une sortie en Haute Définition. Cela n’étonnera pas grand monde au final : souvenons nous que sur les 19 films que compte sa filmographie, seuls trois longs-métrages sont à ce jour disponibles sur support Blu-ray. En effet, et aussi incroyable que cela puisse paraître, on ne peut encore découvrir en France en Haute Définition les plus beaux films de cet artiste incontournable. Faudrait peut-être voir à se sortir les doigts du cul les gars !

Côté DVD cela dit, il n’y a aucun doute, l’éditeur Orange Studio connaît le support sur le bout des doigts et maîtrise l’encodage de façon vraiment remarquable. Qu’il s’agisse de la définition, des couleurs ou de la gestion bruit vidéo, tous les écueils auxquels on pourrait s’attendre sont brillamment et soigneusement évités. Niveau image, c’est donc vraiment un sans faute : l’image respecte pleinement la photographie du film, qui est bien sûr proposé dans son format Scope respecté, et la définition est exemplaire, sans le moindre problème de compression ou autre pétouille technique. Coté son, le mixage Dolby Digital 5.1 se révèle très rapidement ample et dynamique, et fait le boulot de façon très immersive et vraiment dynamique. On notera également la présence d’un mixage stéréo en Dolby Digital 2.0, plus anecdotique évidemment d’un strict point de vue acoustique, mais probablement plus clair et équilibré si vous visionnez le DVD sur un simple téléviseur. Pas de bonus, mais le seul fait de (re)découvrir le film est un cadeau en soi…

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