Halloween
États-Unis : 2018
Titre original : –
Réalisateur : David Gordon Green
Scénario : Jeff Fradley, Danny McBride, David Gordon Green
Acteurs : Jamie Lee Curtis, Judy Greer, Andi Matichak
Éditeur : Universal Pictures
Durée : 1h46
Genre : Horreur
Date de sortie cinéma : 24 octobre 2018
Date de sortie DVD/BR : 27 février 2019
Laurie Strode est de retour pour un affrontement final avec Michael Myers, le personnage masqué qui la hante depuis qu’elle a échappé de justesse à sa folie meurtrière le soir d’Halloween 40 ans plus tôt…
Le film
[4/5]
Révélée en 1978 par son rôle de Laurie Strode dans Halloween – La nuit des masques de John Carpenter, Jamie Lee Curtis incarnerait à nouveau ce personnage en 1981 et 1983, dans les deux premières suites au film de Carpenter. Puis, l’actrice est peu à peu parvenue à se détacher des frusques du personnage qui l’avait fait débuter au cours des années 80/90, avec des films tels qu’Un fauteuil pour deux (John Landis, 1983), Un poisson nommé Wanda (Charles Crichton, 1988), Blue steel (Kathryn Bigelow, 1990) et bien sûr l’époustouflant True lies (James Cameron, 1994). En 1998, elle reprendrait le rôle de Laurie Strode pour la quatrième fois de sa carrière avec Halloween 20 ans après, puis une cinquième et supposée dernière en 2002 dans Halloween : Resurrection, huitième opus de la saga. Afin de bien être sûre de tirer un trait définitif sur le personnage de Laurie Strode, Jamie Lee Curtis et les auteurs avaient en effet décidé de faire mourir le personnage, tué par Michael Myers dans ce qui s’avérera l’un des meilleurs moments de toute la franchise Halloween. Ce que n’avait peut-être pas anticipé l’actrice, alors âgée de 44 ans, c’est que tirer un trait sur Laurie Strode signifierait rapidement tirer un trait sur sa carrière toute entière. Hollywood est cruel avec les actrices de plus de 40 ans : trois ans après le succès de Freaky Friday : Dans la peau de ma mère (2003), le téléphone ne sonne plus que très rarement, et l’actrice déclare vouloir se consacrer à sa vie de famille. Quelques années plus tard, elle retente une percée via la télévision, mais c’est bel et bien le « genre » qui l’a vue naître qui la réclame à cor et à cris : on la remarque surtout en 2015 dans la série Scream Queens, créée par Ryan Murphy. Le public veut la voir dans la peau de Laurie Strode, mais comment faire, puisque le personnage est mort depuis 2002 ?
Jason Blum, que l’on retrouve à la production de cet Halloween cuvée 2018, n’est certainement pas le genre de personnage à s’encombrer l’esprit de détails aussi insignifiants. Le personnage incarné par Jamie Lee Curtis est mort ? « So what ? » Si le public tient à la revoir, on ne va pas s’en priver. Bien sûr, cela pourra vaguement gêner les scénaristes aux entournures, ces derniers évoquant au cours des interviews données à la sortie du film la création d’une nouvelle « timeline » alternative au cœur de la saga, commençant après le premier et faisant fi de tous les autres films. Mais dans le fond, tout le monde s’en fout, c’est Jason Blum qui a raison : on ne compte plus les morts puis les résurrections des grands « boogeymen » de cinéma, de Freddy à Jason en passant par Chucky. Et si l’on commence à aller par-là, toutes les grandes sagas du cinéma posent des problèmes de continuité : les premières suites de Massacre à la tronçonneuse, d’Indiana Jones ou de Terminator comptaient déjà leur lot d’incohérences et de problèmes narratifs, et les autres suites n’ont jamais fait qu’enfoncer un peu plus le clou.
Le retour de Jamie Lee Curtis aux affaires ramènera également John Carpenter, réalisateur du film original, qui donnera sa bénédiction au projet et en signera même la musique, en compagnie de son fils Cody Carpenter et Daniel Davies. Côté scénario et mise en scène, Halloween nous réservera en revanche quelques surprises, puisque le film sera réalisé par David Gordon Green, que l’on connaît surtout pour avoir réalisé, entre 2008 et 2012, une petite série de comédies avec Seth Rogen, Danny McBride ou encore Jonah Hill. Plus étonnant encore, on retrouvera du côté des scénaristes, aux côtés de Jeff Fradley et David Gordon Green lui-même, à nouveau le nom de Danny McBride, qui n’est pas spécialement réputé pour son sérieux. Et pourtant, Halloween fonctionne indéniablement. Si l’on est à cent lieues de la tournure brutale et sans concessions initiée par les deux films de Rob Zombie entre 2007 et 2009, David Gordon Green opère ici un véritable « retour aux sources », avec un Michael Myers faisant figure de véritable croque-mitaine, surnaturel, immortel, véritable « monstre » n’ayant pas de visage humain, et crédité au générique sous le nom de « The shape » (la forme, l’ombre), tout comme il l’était au générique du film de 78. Le film développe également une vision de l’horreur et du fantastique « à l’ancienne », mettant au ban les « jump-scares » et autres artifices de l’horreur moderne pour se concentrer sur la construction d’une ambiance, tendue à souhait. Quasiment centré autour du personnage de Laurie Strode (tant qu’à faire, puisque le salaire de Jamie Lee Curtis doit représenter une bonne partie du budget, autant la rentabiliser !), Halloween met vraiment en opposition ces deux figures mythiques de la saga, tout en multipliant les clins d’yeux appuyés au film inaugural signé Carpenter. Mais la médaille a son revers : littéralement « vampirisé » par ses deux têtes d’affiche, le film de David Gordon Green peine un peu à faire « exister » les deux autres membres de la famille Strode, à savoir Karen, la fille de Laurie (Judy Greer), et Allyson, sa petite-fille (Andi Matichak).
Néanmoins, on ne pourra que se rendre à l’évidence : si l’on met de côté les deux films de Rob Zombie, cet Halloween version 2018 nous offre sans aucun doute quelques-unes des plus belles scènes jamais mises en boite au cœur de la saga depuis Halloween 2 en 1981. On pense bien sûr à ce sublime plan-séquence débarquant à mi-métrage, suivant les pérégrinations meurtrières de Michael Myers à Haddonfield, et qui aura vraiment de quoi vous laisser sur le cul. Mais le film se ménage également quelques bons gros moments de tension dans son dernier quart, notamment durant la traque de Myers par Laurie au cœur de sa maison « piégée », chaque pièce visitée réduisant – par un subterfuge scénaristique vraiment habile – le champ des possibles quant aux « cachettes » que peut utiliser ce tueur plus que jamais fantomatique. Une excellente surprise donc, qui s’est d’ailleurs offert un très confortable succès au box-office international : avec plus de 250 millions de dollars de recettes (et 844.000 entrées en France), cet Halloween 2018 enregistre le plus gros succès jamais réalisé par un film de la saga : voilà qui risque fort de relancer la franchise pour les années à venir !
Le Blu-ray
[4,5/5]
Autant être clair d’entrée de jeu : le Blu-ray d’Halloween édité par Universal Pictures est tout simplement superbe, et rend un vibrant hommage à la qualité des images de ce film d’horreur à l’ancienne, sublimées par la photo du film signée Michael Simmonds (Nerve). Le spectateur est happé d’entrée de jeu, la définition, le piqué, les contrastes et surtout les couleurs sont réellement de toute beauté. Le niveau de détail, même dans les arrière-plans, ne sont jamais pris en défaut, seuls quelques scènes parmi les plus sombres montrent occasionnellement quelques signes de faiblesse et une légère pixellisation – dans l’ensemble néanmoins, il s’agit là d’un Blu-ray techniquement au point, parfaitement recommandable. Niveau son, la VO s’offre un mixage en DTS-X (11.2 !), qui sera, faute de matériel adéquat, décodé dans un DTS-HD Master Audio 7.1 et qui permettra au spectateur de se plonger au cœur du film de la façon la plus efficace possible : l’immersion est totale, la spatialisation joue la carte de l’ambiance, de l’efficacité et de la finesse : une pure démo acoustique. De son côté, la version française ne bénéficie « que » d’un mixage DTS 5.1, proposant cela dit également une immersion du tonnerre. Du très beau travail pour une galette indispensable.
Du côté des suppléments, l’éditeur Universal nous propose un éventail très complet de bonus, revenant sur différents aspects de la production en environ 40 minutes évitant assez habilement les redondances. On commencera avec une douzaine de minutes de scènes coupées ou étendues, et certaines d’entre elles, travaillant notamment à étoffer les personnalités d’Allyson et de ses camarades, s’avèrent très intéressantes. On continuera avec un making of divisé en quatre featurettes thématiques (le tournage / le personnage de Laurie Strode / le personnage de Michael Myers / la musique du film), la plus passionnante d’entre elles étant celle consacrée à la conception de la musique par John et Cody Carpenter aux claviers, accompagnés de Daniel Davies à la guitare. On terminera avec une table ronde réunissant Jamie Lee Curtis, John Carpenter, David Gordon Green et Jason Blum, qui permettra aux intéressés de confronter leurs points de vue sur cette nouvelle variation sur l’univers d’Halloween. C’est passionnant mais beaucoup trop court (moins de cinq minutes !) : on aurait aimé les écouter parler pendant des heures !