Frères ennemis
France, Belgique : 2018
Titre original : –
Réalisation : David Oelhoffen
Scénario : Jeanne Aptekman, David Oelhoffen
Acteurs : Reda Kateb, Matthias Schoenaerts, Adel Bencherif
Éditeur : M6 Vidéo
Durée : 1h51
Genre : Policier, Thriller
Date de sortie cinéma : 3 octobre 2018
Date de sortie DVD/BR : 6 février 2019
Manuel et Driss ont grandi comme deux frères inséparables dans la même cité. Mais aujourd’hui tout les oppose. Manuel est à la tête d’un trafic de drogue, alors que Driss est devenu flic. Quand celui-ci est promu aux Stups, son retour bouleverse les équilibres et met Manuel en danger…
Le film
[3,5/5]
Sorti la même semaine qu’Alad’2 et A star is born, qui ont tous deux flirté avec les deux millions de spectateurs en France, Frères ennemis n’a quant à lui réussi à réunir que 177.000 de personnes dans les salles obscures, sur un circuit de 270 salles. Bien entendu, on ne pourra guère arguer que les trois films, tout à fait différents les uns des autres, se soient fait de l’ombre : le public se déplaçant en masse pour voir Kev Adams ou Lady Gaga n’est pas le même que celui suivant la carrière de Reda Kateb, découvert il y a maintenant 10 ans dans Un prophète de Jacques Audiard.
Si l’on devait chercher une raison à l’insuccès en salles du film de David Oelhoffen, on irait plutôt fouiner du côté de son titre et de la façon dont il a été « vendu » sur un affrontement entre deux frères ennemis, qui fleure bon le caprice de producteur, et s’avère indéniablement une fausse bonne idée afin de tenter d’attirer le public, en plus de s’avérer en contradiction totale avec l’esprit du film. Des films nous contant les relations entre deux « frères », réels ou symboliques, n’évoluant pas du même côté de la loi, on ne les compte littéralement plus : il s’agit d’un véritable cliché du polar contemporain, en particulier en France, et orienter sa promo autour d’un élément vu et revu des dizaines de fois ces dernières années, c’était malheureusement faire preuve d’une grave méconnaissance du genre, et aller droit dans le mur.
C’est d’autant plus dramatique que ce titre, Frères ennemis, s’avère un contresens absolu avec ce que raconte le film de David Oelhoffen. Comme le dit le personnage de Reda Kateb à celui incarné par Nicolas Giraud : « On a grandi au même endroit… Ca ne veut pas forcément dire qu’on était amis ». En effet, l’idée de « fraternité » entre les personnages de Reda Kateb et Matthias Schoenaerts n’est sûrement pas ce qui viendra le plus facilement à l’esprit du spectateur à la découverte du film : s’ils ont certes été proches ou amis à une époque, ils n’en sont pas pour autant des « frères », loin de là, surtout au moment des événements relatés au cœur du récit. Le titre international du film, Close enemies, est probablement plus proche de l’esprit du film que celui qui a été sélectionné par les têtes pensantes et communicantes de Bac Films. Dans l’absolu, on se demande vraiment pourquoi avoir abandonné le titre de tournage du film, Territoires : ce dernier était parfaitement cohérent, le sentiment d’appartenance au « territoire » des personnages ayant vécu leur jeunesse dans la cité étant une composante importante – voire même capitale – de l’histoire et de la psychologie des personnages.
Avec cette promo organisée en dépit du bon sens, il aurait été difficile pour Frères ennemis de trouver son public : on comprend que les amateurs de polars rechignant à l’idée de se taper une énième histoire de frères flic et truand n’aient pas pris la peine de voir le film en salle, tandis que les spectateurs qui se déplaçaient au contraire pour assister à ce genre de récit se sont finalement retrouvés face à un film tout à fait différent, ne développant quasiment pas cette thématique. Et c’est bien dommage, car en l’état, le film de David Oelhoffen s’avère un bon petit polar naturaliste, relativement intimiste (dans le sens où il privilégie largement l’atmosphère aux scènes d’action), jouant sur la thématique de l’identité, de la famille au sens large autant que sur celle, implacable, du déterminisme social. Comme d’habitude, Reda Kateb s’avère sidérant de justesse et de sobriété. Face à lui, Matthias Schoenaerts étonne par l’intensité de son jeu, qui renforce encore un peu plus la portée émotionnelle d’un final aux accents tragiques ; un final placé quant à lui sous le signe de la vengeance, et sur lequel le cinéaste, subtil, laisse planer un léger doute.
Le Blu-ray
[4/5]
Après être sorti dans les salles sous la bannière de Bac Films, Frères ennemis débarque finalement sur support Blu-ray sous les couleurs de M6 Vidéo, qui prend en charge son exploitation en vidéo. Et comme souvent avec l’éditeur français, il y aura finalement bien peu à (re)dire sur la galette Haute-Définition du film de David Oelhoffen : le boulot technique assuré ici par M6 est quasi-irréprochable. L’image est assez superbe, et propose un encodage de première bourre ; le piqué est précis, et le niveau de détail est très élevé. Même dans les séquences les plus sombres, le master tient la route sans le moindre souci. Coté son, la piste DTS-HD Master Audio 5.1 est étonnamment dynamique, proposant des effets multicanaux discrets mais efficaces : du très beau travail. On notera également la présence de sous-titres à destination des sourds et malentendants, ainsi qu’une piste DTS-HD Master Audio 2.0, plus équilibrée si vous visionnez le film sur un téléviseur, sans utiliser de Home Cinema.
La section bonus en revanche n’est pas très fournie : l’éditeur nous propose uniquement de découvrir la bande-annonce du film.