Alpha
États-Unis : 2018
Titre original : –
Réalisation : Albert Hughes
Scénario : Albert Hughes, Daniele Sebastian Wiedenhaupt
Acteurs : Kodi Smit-McPhee, Jóhannes Haukur Jóhannesson, Marcin Kowalczyk
Éditeur : Sony Pictures
Durée : 1h36
Genre : Aventures
Date de sortie cinéma : 22 août 2018
Date de sortie DVD/BR : 9 janvier 2019
En Europe, il y a 20.000 ans, durant l’ère Paléolithique supérieur, un jeune homme part braver une nature dangereuse et inhospitalière afin de retrouver le chemin de sa tribu…
Le film
[4,5/5]
Voici maintenant huit longues années que l’on n’avait pas eu l’opportunité de voir un nouveau film des frères Hughes. Huit ans après Le livre d’Eli donc, Albert Hughes revient donc enfin au cinéma en réalisant son premier film en solo, Alpha, qui rompt de fait avec un peu plus de vingt ans de collaborations artistiques pour le moins fructueuses avec son frère jumeau Allen. Avec ce nouveau film, Albert Hughes prend le parti de mettre en scène un survival aux accents de « coming of age », et suivant pour la plus grosse partie de son récit un personnage seul, Keda, uniquement accompagné d’un loup.
Vous l’aurez compris : Alpha représente surtout l’occasion pour Albert Hughes de reprendre les expérimentations formelles et narratives largement entamées sur Le livre d’Eli, qui visent à proposer au spectateur un film se reposant sur une narration essentiellement « visuelle », capable de se passer de dialogues et d’explications didactiques. Bien entendu, Rome ne s’est pas faite en un jour, et les studios et producteurs aux manettes derrière Hughes ont probablement imposé au cinéaste le sous-titrage des paroles des membres de la tribu, comme d’ailleurs les mentions écrites expliquant la raison du voyage des hommes de la fameuse tribu. La comparaison entre le montage cinéma et le « director’s cut », tous deux proposés sur le Blu-ray édité par Sony Pictures, ne fera que confirmer cette impression : les petites dérives sanglantes et/ou violentes du director’s cut ont probablement été coupées pour éviter le PG-13 et conserver une exploitation en salles destinée à un public familial, mais ces dernières n’excèdent guère quelques secondes, et le fait de les voir disparaître ne dénature pas le récit. La principale différence entre les deux montages se situe bien dans la façon dont l’histoire du film est amenée au public : la volonté d’Albert Hughes semble bel et bien de proposer un récit chronologique, linéaire, sans recours au flash-back comme dans la version cinéma. Tout simplement sans doute afin de permettre au public de se laisser plus aisément « porter » par l’histoire de Keda, sans allers et retours entre le présent et le passé.
De ce fait, Alpha s’impose plus que jamais comme un cinéma « sensoriel », de sensations pures, au cœur duquel les dialogues et les explications n’ont plus de raison d’être. On vous conseille même de tenter l’expérience : coupez le sous-titrage avant de lancer le visionnage du Blu-ray. Bien sûr, vous ne comprendrez pas avec précision ce que se disent les acteurs, mais vous comprendrez tout de même l’essentiel de ce qui est échangé entre les personnages, par la façon purement visuelle dont Hughes et son directeur photo Martin Gschlacht agencent leur récit. De la même façon, on pourra d’ailleurs avancer que si la relation entre Keda et son père est construite sur un langage commun, ces derniers ne semblent pas nécessairement partager des valeurs communes : s’il entend et comprend la signification des paroles de son père, leur sens, il ne trouve pas en lui les ressources nécessaires afin de créer une véritable connexion avec lui ; à l’inverse, il se trouvera d’avantage de points communs, et même quasiment un lien spirituel, avec le loup blessé dont il commence à s’occuper. Son « instinct » lui permettra d’apprendre les leçons que son père a tenté de lui enseigner : là où la structure rigide de la tribu et la rudesse de son père ont échoué, les épreuves et son lien d’amitié avec le loup réussiront finalement à faire de Keda un homme.
Visuellement époustouflant, Alpha déroule donc son récit dramatique de façon très intense et immersive, adaptant sa structure narrative à l’histoire qui nous est contée : le film d’Albert Hugues se nourrit réellement des liens non verbaux qu’ils développe entre le jeune homme et le loup. Ainsi, à la façon de quelques autres grands films purement « sensoriels » avant lui, Alpha aurait peut-être encore mieux fonctionné sans aucun dialogue, mais même en l’état, la puissance intrinsèque du film, renforcée par sa structure narrative et son recours systématique à l’image pour faire évoluer le récit, s’avère une remarquable réussite, qu’on aurait tort de bouder.
Le Blu-ray
[5/5]
Merveilleux, somptueux, fantastique, splendide, voilà sans doute quelques-uns des adjectifs qui traverseront sans doute l’esprit à la découverte du Blu-ray d’Alpha édité par Sony Pictures. La galette Haute Définition rend en effet tous les honneurs à la photographie du dernier film d’Albert Hugues, signée Martin Gschlacht. En effet, l’encodage qui nous est ici proposé en Bleu nous offre un spectacle visuel de toute beauté, composé de tableaux visuellement magnifiques s’imposant comme autant d’images inoubliables. En deux mots, la définition est magistrale, et tout simplement irréprochable. Côté son, VF et VO sont proposées en DTS-HD Master Audio 5.1, dans des mixages qui explosent littéralement tout sur leur passage : les canaux arrières fourmillent d’effets multi-canaux épatants, avec une dynamique et une précision à couper le souffle. Les basses sont tellement intenses que vous les sentirez presque physiquement dans votre fauteuil : le caisson de basses est sollicité à intervalles très réguliers, c’est du lourd.
Côté bonus, l’éditeur a fait du beau travail, en proposant tout d’abord au consommateur à la fois la version « cinéma » et la version « director’s cut », qui, une fois n’est pas coutume, s’avère un tout petit peu plus courte que celle découverte en salles : si l’on repère certes quelques petits plans supplémentaires, on constatera surtout que les toutes dernières minutes du film, en forme de « happy end » un peu forcé, ont disparu, et surtout, le montage est résolument différent, comme on l’a déjà évoqué un peu plus haut dans la critique du film. On continuera ensuite avec un peu moins de dix minutes de scènes coupées, disponibles avec un commentaire facultatif du réalisateur Albert Hughes. Enfin, on terminera le tour des suppléments avec quatre featurettes, qui reviendront sur le casting du film (avec un focus tout particulier sur Kodi Smit-McPhee), mais également sur les décors, le langage utilisé dans le film, les objets et costumes, les lieux de tournage, les animaux en CGI… Mais aussi et surtout sur Chuck, le chien-loup du film, et son entraînement. Un tour du propriétaire relativement orienté promo, mais qui permettra au spectateur de prolonger le plaisir pris devant le film durant une vingtaine de minutes.