De retour en salles au mois de juin 2018

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Au cinéma, l’été rime avec une suite interminable de blockbusters hollywoodiens, presque autant de films qui bénéficient pendant cette saison chaude de sorties techniques et, comme seul refuge pour les cinéphiles tant soit peu exigeants, d’un programme substantiel de ressorties, la plupart du temps dans de somptueuses copies restaurées. Depuis longtemps, c’est cette dernière partie du calendrier estival qui nous séduit le plus. Cet été, vous trouverez donc au moins trois fois, en juin, juillet et août, notre tour d’horizon de ces chefs-d’œuvre et raretés d’antan qui illumineront à nouveau les écrans des salles de répertoire les plus ambitieuses. Au programme de ce premier chapitre, il y a du Kubrick, de l’Argento, du Johnny Hallyday, ainsi que des excursions dans des parties de la cinématographie française généralement peu explorées.



Commençons par celui qui était le seul à avoir le courage de ressortir un film pendant cette première semaine du mois de juin 2018, le distributeur Ciné Sorbonne, dont l’arme d’exploitation redoutable est le petit complexe de la Filmothèque au Quartier latin, rue Champollion à Paris. Morocco (1930) de Josef von Sternberg est le premier film que son réalisateur et sa vedette Marlène Dietrich ont tourné aux États-Unis, après le succès international de la production allemande L’Ange bleu. Cette épopée aussi exotique que poisseuse avait valu à Dietrich sa seule et unique nomination à l’Oscar et était le premier de six longs-métrages américains qu’elle allait tourner avec son réalisateur attitré, avant Agent X27, Shanghaï Express, Blonde Vénus, L’Impératrice rouge et La Femme et le pantin. Ciné Sorbonne ne s’arrête pas en si bon chemin, puisque en plus d’une rétrospective en huit films de Ernst Lubitsch (1892-1947) sous le titre « Lubitsch était un prince » à la Filmothèque, il distribue deux films supplémentaires ce mois-ci : le mélodrame classique par excellence Écrit sur du vent (1956) de Douglas Sirk dès demain et le thriller emblématique des années ’90 Le Silence des agneaux (1991) de Jonathan Demme à partir de la semaine suivante. Le premier avait valu à la récemment disparue Dorothy Malone l’Oscar de la Meilleure actrice dans un second rôle et se situe au cœur même de la décennie faste de la filmographie de Douglas Sirk, après Le Secret magnifique et Tout ce que le ciel permet, déjà avec Rock Hudson, mais avant les pas moins somptueux Le Temps d’aimer et le temps de mourir et Mirage de la vie. Quant au deuxième, grâce à ses cinq Oscars majeurs – Meilleur Film, Meilleur réalisateur, Meilleure actrice à Jodie Foster, Meilleur acteur à Anthony Hopkins & Meilleur scénario adapté –, il fait partie d’un club toujours aussi exclusif, auquel n’appartiennent sinon que New York Miami de Frank Capra et Vol au dessus d’un nid de coucou de Milos Forman.



La plupart des films qu’on vous présentera brièvement dans ce texte ont marqué de près ou de loin l’Histoire du cinéma. Rares sont par contre ceux considérés par les générations successives de cinéphiles comme des monuments du Septième Art. 2001 L’Odyssée de l’espace (1968) de Stanley Kubrick est de ceux-là. La Warner le ressort donc en grande pompe pour célébrer son 50ème anniversaire. Après sa présentation au dernier Festival de Cannes dans la section Cannes Classics en 70 mm et par Christopher Nolan, grand admirateur du film, en personne, et un passage en avant-première au cinéma l’Arlequin à Paris dans cette fameuse copie unique, ce sera donc dès demain la France toute entière – en fonction du courage de vos exploitants locaux – qui pourra redécouvrir ce voyage hautement spectaculaire et philosophique vers l’origine de l’humanité. Pour les puristes de la pellicule argentique, il faudra alors faire le déplacement à Lille au Kinepolis Lomme qui projette en exclusivité le film dans son format d’origine. Pour tous les autres, le Max Linder à Paris fera parfaitement l’affaire afin de plonger tous ses sens dans ce film hors normes, quoique sur un nombre réduit de séances et uniquement à partir du 20 juin. Dans une filmographie soumises à des manifestations d’adoration parfois excessives, 2001 L’Odyssée de l’espace se distingue par l’importance qu’il a pris au fil du temps, étant considéré lors de sa sortie initiale par certains comme une incitation indirecte à la consommation de drogues. Il s’agit également du seul film pour lequel Stanley Kubrick avait gagné un Oscar, celui des Meilleurs effets visuels, l’Académie américaine lui préférant à l’époque dans la catégorie reine du Meilleur réalisateur Carol Reed pour la comédie musicale Oliver.



Johnny Hallyday (1943-2017) est mort depuis six mois et pour quiconque ne paie pas de près attention à l’héritage culturel de la vedette nationale, il serait tentant de croire que le chanteur de légende tombe doucement dans l’oubli, maintenant que les querelles au sein de sa famille paraissent au moins être mis en suspens. C’est pourtant tout le contraire, puisque la folie des fans est sans cesse alimentée, par exemple par des concerts hommages, des sorties d’albums posthumes ou bien par la sortie improbable dès demain de trois de ses films, qui n’ont certes par marqué l’Histoire du cinéma, mais qui retranscrivent parfaitement l’aura irrésistible du phénomène Johnny. Le roi des distributeurs français des films de patrimoine Carlotta a orchestré cette sortie simultanée sur grand écran et en DVD, donc d’ores et déjà chroniquée par notre confrère infatigable Mickaël. Il serait sans doute préférable de voir ces trois films de façon rapprochée, tant ils valent la redécouverte avant tout pour la place de choix qu’ils aménagent à leur vedette. Car parmi D’où viens-tu Johnny ? (1963) de Noël Howard, Le Spécialiste (1969) de Sergio Corbucci et Point de chute (1969) de Robert Hossein, c’est principalement le western italien qui a su résister à l’épreuve du temps, les deux autres ne devant leur restauration qu’à l’engouement médiatique que suscite plus que jamais le mythe Johnny Hallyday.



Puisque les chers bambins seront en vacances dans moins d’un mois, les distributeurs se positionnent dès à présent avec des films d’animation, susceptibles de faire les beaux jours du jeune public pendant cet été. Dès demain sortiront donc chez Disney le classique du studio Ghibli Mon voisin Totoro (1988) de Hayao Miyazaki et chez Splendor Films Rock’O’Rico (1991) de Don Bluth. C’est déjà le cinquième film du réalisateur que le distributeur parisien sort en trois ans, après les reprises récentes de Brisby et le secret de Nimh et d’Anastasia.



Dans l’actualité cinématographique à travers la sortie récente de ses deux derniers films, le réalisateur français Paul Vecchiali revient en quelque sorte par la petite porte, à savoir la mini-rétrospective « L’Expérience Diagonale » que le distributeur indépendant La Traverse consacre au studio Diagonale qu’il avait fondé en 1976. Trois films sont au programme de ce cycle, à l’affiche dès demain, un échantillon nullement exhaustif de la vingtaine de films que Vecchiali avait produit jusqu’au milieu des années ’90. Ce sont les œuvres de Jean-Claude Guiguet (Les Belles manières – 1978), Marie-Claude Treilhou (Simone Barbès ou la vertu – 1979) et Gérard Frot-Coutaz (Beau temps mais orageux en fin de journée – 1985), avec respectivement Hélène Surgère, Ingrid Bourgoin et Micheline Presle, qui ont été restaurées pour une exploration du patrimoine filmique français hors des sentiers battus.



C’est surtout la fille actrice du réalisateur italien Dario Argento (*1940), le génie du giallo, qui fait la une ces derniers temps, hélas toujours dans un contexte particulièrement tendu : lorsque Asia Argento profite de la scène du dernier Festival de Cannes pour rappeler avec courage les abus qu’elle a subis de la part de Harvey Weinstein ou bien à peine quelques jours plus tard, lors de l’annonce du suicide de son compagnon Anthony Bourdain. Quant à son père, il fera l’objet d’une rétrospective partielle de cinq films, dont les incontournables L’Oiseau au plumage de cristal (1970), Le Chat à neuf queues (1971) et Suspiria (1977), concoctée par Les Films du Camélia à l’occasion de la ressortie en version restaurée le 27 juin de Les Frissons de l’angoisse (1975) avec David Hemmings et Macha Méril. De quoi se préparer sereinement à la sortie prochaine, prévue en France pour le mois de novembre, du remake de Suspiria par Luca Guadagnino.



Enfin, quelques ressorties en vrac de ce mois de juin, qui célèbre avant tout le cinéma des années ’60, ’70 et ’80 :

  • l’été 2017 avait été placé sous le signe du maître russe Andreï Tarkovski avec la sortie de pas moins de six de ses films. Le distributeur Tamasa joue d’une certaine manière les prolongations, avec la ressortie le 20 juin du dernier film du réalisateur Le Sacrifice (1986) avec Erland Josephson, Grand prix au Festival de Cannes par le jury sous la présidence de Sydney Pollack.
  • le dernier film de la réalisatrice française Diane Kurys, Arrête ton cinéma sorti en janvier 2016, n’est guère resté dans les mémoires. Ses premiers longs-métrages jouissent par contre d’un intérêt renouvelé, puisque après son premier Diabolo Menthe en août dernier, c’est désormais à son deuxième Cocktail Molotov (1979) de ressortir à la fois en DVD et au cinéma, le 20 juin également. L’occasion idéale de poursuivre le travail de mémoire à l’égard de Mai ’68 par le prisme du cinéma et de revoir un jeune François Cluzet à ses débuts !
  • quinze ans après la découverte du réalisateur Park Chan-wook en France avec Sympathy for Mr Vengeance et alors que le conflit coréen pourrait enfin être désamorcé, le distributeur La Rabbia nous convie le 27 juin à la découverte de l’inédit JSA Joint Security Area (2000) avec Song Kang-ho, le troisième film de Park et celui qui lui avait permis de se faire progressivement un nom sur la scène internationale, entre autre grâce à sa sélection en compétition au Festival de Berlin en 2001.
  • et puis, le même jour, un film infiniment moins respectable refera surface par le biais de Les Tueurs de la lune de miel (1969) de Leonard Kastle, un précurseur hautement jouissif des films de tueurs en série, version trash, dans lequel le beau Tony Lo Bianco et la voluptueuse Shirley Stoler se font un malin plaisir de trucider des épouses aussi naïves que dispensables.

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