Quinzaine 50 : une histoire en affiches

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Héritière directe de ceux qui voulaient affranchir le cinéma de ses chaînes en 1968, la Quinzaine célèbre cette année sa 50e édition. L’occasion d’une promenade à son image – en toute liberté, et forcément subjective – dans une histoire chargée de découvertes, d’audaces, d’enthousiasmes, de coups de maîtres et de films devenus incontournables.

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Ce n’est pas anodin, une affiche. Chaque année, c’est un peu elle qui donne le ton de la nouvelle édition, tout en restant dans l’identité visuelle générale de la section. La Quinzaine, comme la sélection officielle, a ainsi connu différentes périodes, tantôt très référencées, tantôt plus abstraites, qui racontent à leur manière l’histoire de cette branche parallèle du festival de Cannes qui a toujours cherché la singularité.

Dès 1969, l’affiche de la première édition donne le ton. Ici, ce sont les films et leurs auteurs qui sont à l’honneur, et ils s’étalent en blanc sur fond rouge, donnant immanquablement l’envie de les déchiffrer un à un. La formule de la Quinzaine, « Cinéma en liberté », apparaît quant à elle tout en haut, sans que l’on sache s’il s’agit d’une mise en garde, d’un cri de ralliement ou d’une menace.

En 1970, elle aura disparu, remplacée sobrement par la mention « Festival de Cannes 1970 » (qui ne figurait pas la première année) au-dessus de quelques photogrammes célèbres de l’Entrée du train en gare de la Ciotat. Les frères Lumière sont ainsi convoqués en parrains bienveillants de cette jeune section pleine d’enthousiasme. Ils seront de retour l’année suivante, avant de céder (logiquement) la place à Georges Méliès et à une déclinaison de l’image restée célèbre du Voyage dans la Lune, lorsque la capsule se plante dans l’œil du satellite. Plusieurs variantes suivront jusqu’en 1975.

Le cinéma, d’une manière générale, aura toujours une place primordiale sur les affiches de la Quinzaine : une façade de cinéma (le Star) en 1978, un écran éclairé (sur la plage) en 1979, une sorte d’homme-caméra (ou projecteur ?) en 1981, le diptyque 83-84, avec une femme gravissant les marches rouges, puis à l’intérieur du cinéma, ou encore une scène de film en ombre chinoise en 1991. Sans oublier les hommages explicites, d’Henri Langlois en 1977 (quelques mois seulement après sa mort) à Robert Bresson en 2008 (il avait été sélectionné en 1969 avec Une femme douce, en 1971 avec Quatre nuits d’un rêveur, et en 1977 avec Le diable, probablement), en passant par Maurice Pialat (l’année de sa mort, en 2003).

Les films s’affichent parfois eux-aussi, comme en 1993, qui nous fait voyager de L’Empire des Sens à THX 1138, de Stranger than Paradise à Mean streets, ou en 1998, avec à nouveau L’Empire des sens et Mean Streets, mais aussi Salaam Bombay, Aguirre, la colère de Dieu, Mais ne nous délivrez pas du mal ou encore Les silences du Palais. En 2009, ce sont Albert Serra (réalisateur de Honor de cavalleria, Le Chant des oiseaux) et Lolita Chammah (actrice vue dans Les Bureaux de Dieu), puis, en 2011, des pictogrammes qui représentent à nouveau des films passés (ou non) par la Quinzaine (une idée de Frédéric Boyer, le délégué général de l’époque).

Plus hasardeux, la mer et la ville de Cannes se sont parfois invitées de manière un peu brutale sur l’affiche. On pense aux éditions 85 à 88 puis 94-95, 99-2000. En 1986, ce phare au milieu de la mer nous rappelle par exemple que la Quinzaine sert de guide aux cinéphiles perdus dans la nuit.

Ces dernières années, sous la houlette notamment du concepteur graphique Michel Welfringer, la Quinzaine s’est fait une spécialité d’affiches sobres et dépouillées, souvent en noir et blanc, qui racontent une histoire en plus de frapper l’imagination par leur force esthétique. En 2014, on découvre un homme qui plonge dans l’écran, ou pénètre dans un monde sombre et hostile, au choix des interprétations. En 2016, c’est l’écho d’une rencontre forcément cinématographique entre un homme et une femme dont il ne reste que des lambeaux d’affiche. En 2017, place au rêve !

Et cette année, place aux femmes, avec cette joueuse de base-ball immortalisée par William Klein, et qui devient le symbole de toutes les femmes (réalisatrices et personnages) qui ont contribué à faire le Quinzaine. Ce qui place cette 50e édition sous les meilleurs auspices, et nous réconcilie quelque peu, il faut le dire, avec l’esthétique kitsch des premières années.

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