Décès de Kenny Baker alias R2D2

L’acteur anglais de petite taille Kenny Baker, haut de 1,12m, rentré dans la légende du cinéma contemporain en interprétant R2D2 est décédé à l’âge de 83 ans ce samedi 13 août des suites d’une longue maladie. Il a fait ses débuts dans le costume du robot culte dès le premier épisode de Star Wars, La Guerre des étoiles (depuis rebaptisé Un Nouvel Espoir) et avait repris le rôle dans les deux films suivants de la première trilogie (L’Empire contre-attaque et Le Retour du Jedi dans lequel il joue aussi un Ewok, celui qui vole un speeder bike de l’Empire) ainsi que dans les trois prequels (La Menace Fantôme ; L’Attaque des Clones ; La Revanche des Siths). Déjà affaibli par la maladie, il n’est que consultant sur le premier volet de la nouvelle série démarrée par J.J.Abrams mais est néanmoins crédité dans le générique. Il est aussi apparu en tant que R2D2 dans The Star Wars Holiday Special en 1978 (l’émission spéciale Noël honnie) et un épisode du Muppet Show et est intervenu dans plusieurs documentaires et reportages pour évoquer son implication dans cette œuvre culte.

Kenny Baker a bien failli rater cette opportunité de carrière. «Je n’avais aucune envie d’être coincé dans un robot comme un œuf dur» disait-il dans l’interview vidéo à retrouver en fin d’article. George Lucas l’a convaincu en lui expliquant qu’il était le seul à pouvoir le faire : «Tu es le seul assez petit pour pouvoir rentrer dedans et suffisamment costaud pour le manipuler correctement». Enfin, il précise qu’il était impossible de demander à un enfant de le faire à cause des longues heures de tournage. 20th Century Fox a twitté en son hommage qu’il «était le cœur et l’âme de Star Wars».

Pour donner vie à R2D2 et lui permettre de s’exprimer «humainement», il pouvait glisser sur le côté ou se balancer de droite à gauche et inversement, glisser légèrement vers le côté ou l’avant, il ne lui manquait que la voix, supplée par les effets sonores de Ben Burtt. Finalement, son interprétation annonce celle en motions capture d’aujourd’hui, mais avec les moyens du bord de l’époque. L’importance de R2D2 dans l’histoire est majeure, il est celui qui permet aux plans de l’Etoile Noire, cachés par la Princesse Leïa, d’atteindre la rébellion. Le vol de ces mêmes plans est au cœur du scénario du spin-off/prequel Rogue One à découvrir le 14 décembre prochain.

Sa complicité à l’écran avec Anthony Daniels / C3PO, seul autre acteur présent dans les six premiers films, ne se répète pas en dehors. En off, les deux comédiens ne s’entendent guère, comme on peut le lire ici (pour les anglophones). L’attitude de Daniels semble assez méprisante à son égard, jusqu’à récemment où le sympathique interprète droïde jaune révélait que la présence de Baker au générique du septième volet relevait au mieux du geste porte-bonheur, comme un talisman.

Dans une interview en 2006, relayée sur le site du Telegraph, Baker rapportait leurs échanges limités sur le tournage : «Nous étions tous les deux dans nos costumes de droïdes. Il n’y avait aucune connexion entre nous. Nous ne pouvions ni nous entendre ni nous voir. George Lucas nous hurlait de regarder vers la gauche ou la droite et il voulait que j’exprime des émotions telles que la joie ou la tristesse. Ce n’était pas facile, et cela l’était aussi peu pour C3PO. Il devait enregistrer ses dialogues plus tard en respectant le rythme de ses mouvements. […] Il arrivait une heure avant moi pour entrer dans son costume, il ne me fallait que cinq minutes pour rentrer dans R2D2. Quand nous avions fini, on enlevait le couvercle et j’étais dehors. Enlever son costume prenait une bonne heure. Nous n’avions pas beaucoup d’opportunités pour nous croiser».

En 2011, Anthony Daniels confiait au Mirror son dédain pour son partenaire à l’écran : «Je ne l’ai jamais vu. R2D2 ne parle même pas, il pourrait aussi bien n’être qu’un seau». Daniels précisait encore : «Il n’a cessé de tenir des propos déplaisants à mon égard. Je préfère ne pas les commenter».

Baker a, par contre, eu de réels liens d’amitié avec d’autres acteurs de la franchise dont Mark Hamill qui avait partagé énormément de scènes avec lui, Peter Mayhew alias Chewbacca ou David Prowse alias Darth Vader qu’il avait connu alors qu’il était videur dans un bowling !

Sa carrière ne se limite pas à ses apparitions en R2D2. Après une apparition dans Le Cirque des horreurs et l’oeuvre créée par George Lucas, on le voit dans Flash Gordon de Mike Hodges, Elephant Man de David Lynch, Amadeus de Milos Forman, Labyrinthe de Jim Henson, Willow de Ron Howard et 24 Hour Party People de Michael Winterbottom où il est un gardien de zoo. Il tient des emplois plus conséquents dans Bandits, bandits de Terry Gilliam (Blasphème, alias Fidgit en VO est d’ailleurs son rôle préféré), Mona Lisa de Neil Jordan et la mini-série Prince Caspian and the Voyage of the Dawn Treader (une adaptation des Chroniques de Narnia) en 1989.

Né à Birmingham le 24 août 1934, Kenny Baker avait fait ses débuts sur scène au sein des Midgets de Burton Lester et rejoint plus tard le cirque de Billy Smart. Lorsqu’il est engagé pour le rôle de R2D2, il fait du cabaret avec Jack Purvis, qu’il retrouvera sur Bandits, Bandits et qui apparaît dans les trois premiers films sous différentes identités dont un Ewok avec lequel il partage des scènes dans Le Retour du Jedi.

George Lucas l’avait repéré alors qu’il participait à des spectacles musicaux comiques au sein des Mini Tones. Ses partenaires lui rendent hommage sur les réseaux sociaux, de Mark Hamill à Ewan Mc Gregor en passant par Warwick Davis qui souligne qu’il fut un modèle pour les acteurs de petite taille. L’hommage de Guillermo del Toro est assez joli : «Un grand homme, et, comme Napoléon, sa stature ne se mesurait pas de la tête aux pieds mais de la tête au ciel».

L’acteur écossais Jimmy Vee a repris le rôle pour le huitième volet dont le tournage s’est récemment achevé.

Kenny Baker avait fait sa dernière apparition publique à l’occasion de la première du Réveil de la force à Londres en décembre dernier.