Trois souvenirs de ma jeunesse
France : 2014
Titre original : –
Réalisateur : Arnaud Desplechin
Scénario et dialogues : Arnaud Desplechin, Julie Peyr
Acteurs : Quentin Dolmaire, Lou Roy-Lecollinet, Mathieu Amalric
Éditeur : Blaq Out
Durée : 1h59
Genre : Drame
Date de sortie : 20 mai 2015
Date de sortie DVD : 13 octobre 2015
Le film
[2.5/5]
Après de nombreuses années passées en Asie, Paul Dédalus va revenir en France, à Paris, où l’attend un poste au Ministère des Affaires étrangères. Dès sa sortie de l’avion, ce retour commence par un incident très inattendu : un interrogatoire policier justifié par l’existence d’un autre Paul Dédalus, un français né le même jour que lui, au même endroit que lui et vivant en Australie. Cet interrogatoire conduit Paul à retourner dans son passé et à revisiter trois moments importants qui ont marqué sa jeunesse : son enfance à Roubaix auprès d’une mère qu’il n’a jamais aimée, un voyage scolaire à Minsk, en URSS, au cours duquel il va donner son passeport à celui qui va devenir son « jumeau » australien et sa relation amoureuse avec Esther, lui, poursuivant ses études à Paris, elle, plus jeune, lycéenne à Roubaix.
En général, les avis des cinéphiles sur le cinéma d’Arnaud Desplechin sont très tranchés : il y a ceux qui l’encensent sans modération, portant aux nues un représentant majeur du cinéma romanesque, un réalisateur d’une grande profondeur dont la culture et les audaces narratives les impressionnent et les passionnent ; et puis il y a ceux que rebutent, entre autre, une prétention intellectuelle bâtie sur de nombreuses citations, très factice à leurs yeux, et l’utilisation fréquente d’artifices de mise en scène qui n’apportent rien au film mais peuvent donner l’impression d’un grand savoir faire.
Trois souvenirs de ma jeunesse étant découpé en 3 parties appartenant chacune à un genre différent, l’impression que l’on peut ressentir est très variable. Intitulée « Enfance », la première partie appartient au genre fantastique, c’est la plus courte, elle aurait pu être passionnante, elle ne l’est pas du tout. La deuxième, intitulée « Russie » appartient au genre aventure : cette histoire de voyage en URSS, avec la rencontre de Paul et de son ami Marc avec des refuzniks juifs souhaitant émigrer en Israël, est réalisée avec beaucoup de sobriété et s’avère très réussie. Quant à la troisième, intitulée « Esther », de loin la plus longue, elle raconte l’histoire d’amour entre Paul et Esther : on y trouve, en cherchant bien, toutes les qualités et tous les défauts du cinéma de Desplechin. Il y a des scènes entre Paul et Esther qui ont beaucoup de grâce et de sensibilité, il y a des scènes ou des dialogues qui sont totalement grotesques (Un exemple ? La scène qui voit Bob s’embrouiller avec ses parents et finir par quitter le giron familial) et il y a même au moins une scène réunissant Paul, Esther et Jean-Pierre qui réussit à être émouvante tout en étant à la limite du grotesque. Autant dire qu’on passe souvent d’un certain plaisir à une irritation certaine !
Trois souvenirs de ma jeunesse étant un film d’Arnaud Desplechin et un prequel de Comment je me suis disputé … (ma vie sexuelle), on retrouve bien entendu Mathieu Amalric dans le rôle de Paul adulte, revenant en France après son séjour au Tadjikistan. C’est Quentin Dolmaire, un étudiant en théâtre, qui interprète le rôle de Paul entre 17 et 20 ans. Il arrive plutôt bien à faire passer les textes compliqués et très peu naturels que Desplechin et Julie Peyr ont écrits pour lui. On sera un peu plus sévère avec Lou Roy-Lecollinet, qui interprète le rôle d’Esther, tenu (lorsqu’Esther est devenue plus âgée) par Emmanuelle Devos dans Comment je me suis disputé … (ma vie sexuelle) et que l’on peut situer physiquement entre Sara Forestier et Lou de Laâge. Cette jeune comédienne s’avère parfois très naturelle, parfois … beaucoup moins !
Le DVD
[4.5/5]
Quoiqu’on puisse penser du film, l’objet DVD que Blaq Out met entre les mains des spectateurs est très réussi. Le film peut être écouté en stéréo ou en 5.1, et regardé avec ou sans sous-titres pour sourds et malentendants. On ne peut que louer la qualité du transfert sur DVD, tant au niveau de l’image que du son. Par ailleurs, le DVD est riche en suppléments. Le plus intéressant est un entretien de 14 minutes avec Arnaud Desplechin qui nous montre un réalisateur beaucoup plus humble, beaucoup moins sûr de lui que ce que ses films pourraient laisser supposer. Il aimerait faire davantage appel à l’improvisation mais reconnait qu’à présent, il ne sait pas faire. En fait, il attend l’acteur qui lui apprendra l’art de l’improvisation. Pour lui, la genèse d’un film est une succession de luttes : il écrit son film, il filme contre ce qu’il a écrit car ce qu’il a écrit ne suffit pas et il monte son film contre ce qu’il a tourné. Le deuxième supplément est un entretien de 12 minutes avec Quentin Dolmaire et Lou Roy-Lecollinet. Quentin, qui vient du théâtre, y évoque la différence de jeu entre théâtre et cinéma, différence dont il a pris conscience en passant de l’un à l’autre : il faut « être » au cinéma alors qu’il faut « faire » au théâtre. Quant à Lou Roy-Lecollinet, elle avoue avoir été surprise par les paroles qu’on lui mettait dans la bouche : des paroles qu’on ne dit pas dans la vraie vie. Sauf, peut-être, Arnaud Desplechin ! Les deux autres suppléments sont un essai casting des deux comédiens d’une durée de 4 minutes et un extrait de Comment je me suis disputé … (ma vie sexuelle) de 4 minutes également.
Ce DVD est disponible, entre autre, directement chez Blaq Out.