Fletch aux trousses
États-Unis : 1985
Titre original : Fletch
Réalisateur : Michael Ritchie
Scénario : Andrew Bergman
Acteurs : Chevy Chase, Joe Don Baker, Dana Wheeler-Nicholson
Éditeur : Wild Side Vidéo
Durée : 1h38
Genre : Policier, Comédie
Date de sortie cinéma : 20 novembre 1985
Date de sortie Blu-ray : 2 septembre 2015
Irwin Fletcher, dit Fletch, est un reporter chargé d’enquêter sur le trafic de drogue sévissant sur les plages de Los Angeles. Alors qu’il se fait passer pour un junkie, il est approché par Alan Stanwyk qui prétend être atteint d’un cancer et lui demande de mettre fin à ses jours contre une forte somme d’argent. Fletch accepte le marché mais a quelques doutes quant aux motivations réelles de Stanwyk…
Le film
[4/5]
Les célébrités et autres « stars du rire » à avoir été révélées par l’émission Saturday Night Live de Lorne Michaels se sont succédées à un rythme très régulier depuis les années 70. Dan Aykroyd et John Belushi (les Blues Brothers), Chevy Chase (Bonjour les vacances, Fletch), Bill Murray (S.O.S Fantômes), Jon Lovitz (Prof et rebelle), Mike Myers et Dana Carvey (Wayne’s World), Eddie Murphy bien sûr, Adam Sandler (Happy Gilmore, Rien que pour vos cheveux), Rob Schneider (Deuce Bigalow), Will Ferrell (Ron Burgundy) ou encore Maya Rudolph et Kristen Wiig (Mes meilleures amies), tous sortent de cet incroyable vivier de talents comiques, et ne composent que la partie visible de l’iceberg, puisqu’au moins une vingtaine d’acteurs et comédiens de stand up un peu moins connus chez nous ont également rencontré le succès en utilisant le show comme un tremplin vers la célébrité.
Relativement peu connu dans l’hexagone, Chevy Chase a pourtant bel et bien connu les joies des salles obscures en France dans les années 80, rencontrant même un certain succès, au même titre que, par exemple, l’excellent Steve Martin. Au tournant des années 90, son nom s’est cependant fait de plus en plus discret, jusqu’à disparaître complètement des radars des cinéphiles français après Les aventures d’un homme invisible ; en 2009, quelques hipsters et geeks de séries TV le repèrent dans la série Community, nouvelle sensation de l’humour drôle télévisuel qui fait rire, et durant l’été 2015, il refait une apparition dans Vive les vacances, reboot-remake-suite (rayez la mention inutile) de Bonjour les vacances, dans lequel il tenait le rôle principal en 1983.
Mais ce que le cinéphile retiendra principalement de la carrière de Chevy Chase restera probablement le rôle d’Irwin « Fletch » Fletcher dans le diptyque Fletch aux trousses (1985) / Autant en emporte Fletch (1989). Film policier porté par son personnage d’enquêteur hors normes, détendu et drôle, au débit et au bagout littéralement intarissables, le film rappelle forcément, dans son déroulement, quelques chefs d’œuvres du genre tels que Le privé de Robert Altman, ou d’autres, qui lui sont postérieurs et s’en seront sans doute un peu inspirés, tels que The big Lebowski des frères Coen ou Inherent vice de Paul Thomas Anderson. Avec son intrigue à tiroirs et la façon à peine voilée dont il dépeint une ville de Los Angeles rongée par le vice et une corruption visible à tous les étages de la société, Fletch se révèle contre toute attente un film riche et vieillissant finalement très peu (seule la musique d’Harold Faltermeyer a naturellement pris un coup dans l’aile), et dont la malice et l’humour constant cachent une vraie volonté de pointer du doigt les dysfonctionnements d’une Amérique en perte de repères.
Le Blu-ray
[4,5/5]
Wild Side Vidéo a pris récemment l’excellente initiative de restaurer et proposer sur support Haute Définition des classiques du polar dont l’éditeur vient d’acquérir les droits pour la France. Le consommateur français va donc pouvoir remplacer / upgrader ses DVD de films inoubliables des années 80, tels que The hot spot, Dangereuse sous tous rapports (dont les droits étaient jusqu’ici détenus par MGM) mais également Fletch et Streets of fire (dont les droits étaient jusqu’ici détenus par Universal).
On salue donc bien bas cette initiative inattendue et courageuse ainsi que l’effort éditorial de Wild Side, qui nous permet d’enfin revoir le film dans des conditions de visionnage que l’on pourra sans trop de peine qualifier d’optimales vu l’âge du film. Certes, on dénotera un léger grain en basse lumière, mais définition, piqué et niveau de détails affichent un niveau inédit, bien supérieur à la séculaire édition DVD du film. Côté son, on se laissera séduire par les deux mixages DTS-HD Master Audio Stéréo 2.0, comprenant bien entendu la VF d’origine dont le doublage est assuré par l’excellent Bernard Murat.
Dans la section suppléments, on trouvera une présentation du film intitulée « Les 1000 visages de Fletch » et assurée par Samuel Blumenfeld, critique et journaliste au Monde, qui nous propose une analyse du film intéressante. Cela dit, on pourra sans aucun doute comparer Blumenfeld au Jean-Claude Van Damme de la critique, puisque ce dernier y emploie des termes de « franglais », parlant à plusieurs reprises des « impersonations » de Chevy Chase (en français, on dit « imitation ») ; de la même façon, on pourra hausser le sourcil en l’entendant répéter de nombreuses fois que tel ou tel film est « invisible », Blumenfeld utilisant le terme dans le sens « irregardable ». En seulement vingt minutes, il évoque donc trois films « invisibles » selon lui : The brave (Johnny Depp, 1997), Golden child – L’enfant sacré du Tibet (Michael Ritchie, 1986) et Autant en emporte Fletch (Michael Ritchie, 1989). Concernant ce dernier film, on émettra quelques réserves : s’il s’avère certes nettement point affuté d’un point de vue politique et social, Autant en emporte Fletch demeure tout de même une bonne comédie, portée par le tempérament comique de Chevy Chase, dont la réception dépendra naturellement du taux d’attachement du spectateur au personnage de Fletch.
On terminera avec un petit mot sur les visuels des DVD / Blu-ray proposés sur cette vague de films édités par Wild Side : plutôt que de ré-utiliser bêtement les affiches ou les habituels montages photo, l’éditeur a fait appel à Thierry Segur, qui a signé à la demande de la branche marketing et éditoriale de l’éditeur quatre visuels originaux et vraiment réussis, à la manière des américains de chez Criterion, qui « ré-interprètent » toujours les films avec des visuels surprenants, et rappelant même carrément le superbe boulot des créatifs de chez Mondo. Bien sûr, chacun selon sa sensibilité aura sa préférence parmi les quatre : personnellement, si le visuel était disponible à la vente en grand format, cette affiche « customisée » de Streets of fire trônerait certainement dans mon salon.