C’est également demain que s’ouvrira un autre festival important, en France celui-là, à plus de six cents kilomètres à l’ouest de Neuchâtel. Il s’agit de la 44ème édition du Festival International du Film de La Rochelle, qui aura lieu jusqu’au 10 juillet inclus. Ce rendez-vous incontournable des amoureux de cinéma au début de l’été avait attiré l’année dernière plus de 85 000 spectateurs pour près de quatre cents séances et 170 longs-métrages présentés. En 2016, le programme est une fois de plus très riche et varié, créant selon la tradition de ce festival joliment fourre-tout un lien entre le cinéma d’hier et d’aujourd’hui, au fil de nombreuses rétrospectives et avant-premières. Espérons donc que le public se rendra en grand nombre du côté du Vieux Port de La Rochelle pour ce festival convivial, volontairement dépourvu d’une compétition pour permettre aux films d’être présentés sur un plan d’égalité !
Seulement trois hommages seront rendus cette fois-ci – contre quatre l’année passée – , à commencer par celui du réalisateur français Alain Guiraudie (*1964). Acclamé au dernier Festival de Cannes pour Rester vertical, qui sortira le 24 août, ce réalisateur français a tourné depuis le début du siècle sept longs-métrages qui ont pour le moins su nous intriguer, voire enthousiasmer, grâce à leur mélange unique d’un charme rural, ouvrier ou gay. A La Rochelle, sa filmographie fera l’objet d’une intégrale, qui comprendra logiquement Du soleil pour les gueux, Ce vieux rêve qui bouge – Prix Jean Vigo en 2001 et nommé au César du Meilleur court-métrage –, Pas de repos pour les braves, Voici venu le temps, Le Roi de l’évasion et L’Inconnu du lac – nommé huit fois aux César en 2014 et César du Meilleur espoir masculin pour Pierre Deladonchamps. Alors que le réalisateur sera présent au festival pendant quatre jours, du 7 au 10 juillet, une rencontre avec lui, animée par le journaliste Philippe Azoury, se tiendra le vendredi 8 juillet à 16h15 à La Coursive.
Le deuxième invité d’honneur du festival de La Rochelle sera le réalisateur suisse Barbet Schroeder (*1941), quatre ans après l’hommage qui lui avait déjà été rendu au Festival de Bobigny. Treize de ses films seront au programme de cette rétrospective, ainsi que le documentaire sur son travail Some More Barbet Schroeder que Victoria Clay Mendoza a tourné l’année dernière. Projetés à La Rochelle seront à la fois certains de ses films hollywoodiens, comme Barfly avec Mickey Rourke et Faye Dunaway, Le Mystère von Bülow avec Jeremy Irons et Glenn Close – Oscar du Meilleur acteur en 1991 et nommé à l’Oscar du Meilleur réalisateur – et J.F. partagerait appartement avec Bridget Fonda et Jennifer Jason Leigh, ses documentaires (Général Idi Amin Dada, Koko le gorille qui parle et L’Avocat de la terreur), ses films français tels que La Vallée avec Jean-Pierre Kalfon et Bulle Ogier, Maîtresse avec Gérard Depardieu, Tricheurs avec Jacques Dutronc et Amnesia avec Marthe Keller et Max Riemelt, ainsi que ses productions internationales comme More avec Mimsy Farmer et le sublime La Vierge des tueurs. Pendant son séjour au festival, Barbet Schroeder présentera La Vallée le samedi 9 juillet à 14h15 au CGR Olympia et participera à une rencontre animée par le journaliste Nicolas Thévenin le lendemain à 16h15 à La Coursive.
Egalement présent au dernier Festival de Cannes pour y recevoir le prix Consécration de France Culture, le maître du cinéma documentaire, l’Américain Frederick Wiseman (*1930), fera une escale à La Rochelle du 1er au 3 juillet. Il y présentera quatorze de ses documentaires, de son premier Titicut Follies de 1967 jusqu’à son dernier In Jackson Heights sorti en mars dernier, en passant entre autres par Hospital – Emmy du Meilleur Documentaire en 1970 – , Welfare, Central Park, La Comédie Française ou l’Amour joué, Public Housing, La Dernière lettre avec Catherine Samie, La Danse Le Ballet de l’Opéra de Paris – nommé au César du Meilleur documentaire en 2010 – , Boxing gym et At Berkeley. La rencontre animée par le journaliste Antoine Guillot et en présence du réalisateur Nicolas Philibert aura lieu le dimanche 3 juillet, toujours à 16h15 et toujours à La Coursive. L’intégrale de l’œuvre de Frederick Wiseman est d’ailleurs en train d’être éditée en DVD par Blaq Out, avec un troisième et dernier coffret à paraître au mois d’octobre.
Enfin, le panorama d’une cinématographie nationale rendra cette année visite au voisin du sud de la Géorgie, la cible du coup de projecteur en 2015, à travers une incursion dans le cinéma turc et plus précisément dans celui des réalisatrices. La figure de proue de cette section « Découverte » sera la réalisatrice Yesim Ustaoglu (*1960), dont quatre films seront projetés à La Rochelle : En attendant les nuages, La Boîte de Pandore avec Tsilla Chelton, Araf Quelque part entre deux et le documentaire de 2004 – inédit en France – Life on their Shoulders. Seront également inclus dans ce tour d’horizon du cinéma turc depuis un point de vue féminin les films de Pelin Esmer (Les Collections de Mithat Bey et La Tour de guet) et Deniz Gamze Ergüven (Mustang – nommé plus tôt cette année à l’Oscar du Meilleur Film étranger et lauréat de quatre César dont celui du Meilleur Premier film), ainsi que trois œuvres inédites, Nobody’s home de Deniz Akçay, Dust cloth de Ahu Öztürk et Motherland de Senem Tüzen. Une rencontre avec deux des réalisatrices, Yesim Ostaoglu et Deniz Akçay, et en présence du directeur du Festival du Film d’Istanbul Kerem Ayan aura lieu le mardi 5 juillet, à la même heure et au même endroit que les autres tables rondes, animée par l’historien du cinéma Ariel Schweitzer.
Les rétrospectives ont pour cadre géographique cette année le Danemark, la France et l’Italie. La première d’entre elles rend hommage au réalisateur danois Carl Theodor Dreyer (1889-1968), qui aura droit à une intégrale, en avant-première du cycle que la Cinémathèque Française à Paris lui consacrera au mois d’octobre. Quatorze longs-métrages, dont neuf muets, y seront visibles, dont le film le plus célèbre du réalisateur La Passion de Jeanne d’Arc, projeté dans une église et accompagné sur des orgues rénovées. Ne manqueront pas non plus à l’appel les films parlants de Dreyer, comme les austères Ordet et Gertrud. Le programme sera complété par huit courts-métrages tournés pendant les années ’40 et ’50, un accompagnement au piano en ciné-concert de tous les films muets, ainsi que par une exposition d’affiches rares et de photos prises par Carl Theodor Dreyer en personne.
La deuxième rétrospective est dédiée au réalisateur français Jean Vigo (1905-1934), le jeune espoir disparu prématurément. Tous ses films seront montrés, à savoir ses trois courts-métrages A propos de Nice, La Natation par Jean Taris et Zéro de conduite et son seul long-métrage L’Atalante avec Michel Simon. Cet hommage sera élargi au compositeur Maurice Jaubert (1900-1940), responsable de la musique du dernier film de Vigo, dont on pourra également entendre les partitions dans Barbe-bleue de Jean Painlevé et La Fin du jour de Julien Duvivier, qui était ressorti récemment en copie restaurée. Une Leçon de musique autour de Maurice Jaubert se tiendra par ailleurs le dimanche 3 juillet à 10h00 à La Coursive.
Enfin, l’acteur italien Alberto Sordi (1920-2003) est mis à l’honneur lors de la troisième rétrospective, qui se conjugue au fil de quinze films. Entre 1953 et ’77, il a campé des personnages typiquement italiens, entre autres dans Les Vitelloni de Federico Fellini, L’Art de se débrouiller de Luigi Zampa, Un héros de notre temps de Mario Monicelli, La Grande pagaille de Luigi Comencini, Une vie difficile de Dino Risi, La Plus belle soirée de ma vie de Ettore Scola et Poussière d’étoiles de lui-même. Cinq des films projetés à La Rochelle seront repris par la Cinémathèque de Toulouse dans le cadre de son festival de cinéma en plein air en juillet et août.
« D’hier à aujourd’hui », sous ce titre, le festival de La Rochelle présente chaque année un avant-programme hautement intéressant des films restaurés qui seront bientôt réédités. Parmi les treize films retenus cette année, ceux-ci nous font particulièrement envie : L’Héritière (1949) de William Wyler, Dieu seul le sait (1957) de John Huston, Cléo de 5 à 7 (1961) de Agnès Varda, présenté par la réalisatrice et Michel Legrand, Masculin féminin (1966) de Jean-Luc Godard, présenté par Chantal Goya, Mémoires du sous-développement (1968) de Tomas Gutierrez Alea, Il était une fois dans l’Ouest (1968) de Sergio Leone, Little Big Man (1970) de Arthur Penn, La Chair et le sang (1985) de Paul Verhoeven, ainsi que les inédits The Adventure of Iron Pussy co-réalisé par Apichatpong Weerasethakul et Below sea level (2008) de Gianfranco Rosi qui viendra le présenter. Un programme annexe reviendra en neuf films sur le documentaire animé, par exemple à travers Persepolis de Marjane Satrapi, Valse avec Bashir de Ari Folman et L’Image manquante de Rithy Panh.
Enfin, le cinéma contemporain est bien sûr aussi largement représenté par le biais du programme « Ici et ailleurs », cette année riche de 44 films. Voici ceux qui seront présentés par leurs réalisateurs respectifs : Apnée de Jean-Christophe Meurisse, Avant les rues de Chloé Leriche, Close encounters with Vilmos Zsigmond de Pierre Filmon (sortie le 16 novembre), Le Dernier continent de Vincent Lapize, Dernières nouvelles du cosmos de Julie Bertuccelli (sortie le 9 novembre), Fuocoamare Par delà Lampedusa de Gianfranco Rosi (sortie le 28 septembre), Gorki Tchekhov 1900 de Fabrice Cazeneuve, Hôtel La Louisiane de Michel La Veaux, Irréprochable de Sébastien Marnier (sortie le 6 juillet), Mercenaire de Sacha Wolff (sortie le 25 janvier 2017), Sieranevada de Cristi Puiu (sortie le 3 août), Sparrows de Runar Runarsson (sortie le 13 juillet), Tour de France de Rachid Djaïdani (sortie le 23 novembre), Victoria de Justine Triet (sortie le 14 septembre), Vita brevis de Thierry Knauff et Le Voyage au Groenland de Sébastien Betbeder.
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