Alors que le festival de Brive, le seul en Europe consacré aux films de 30 à 59 minutes, débutait sous des augures plutôt néfastes avec la rumeur persistante que la municipalité l’aurait préféré au format biennale – ce qui aurait signifié son inéluctable fin à plus ou moins court terme – il s’est clos sur la promesse de la région et de la ville de le conserver à un rythme annuel. Heureusement car le nombre de billets vendus est en hausse constante, la sélection était d’un excellent niveau et les diverses initiatives prises autour du moyen-métrage indispensables ; tant l’éducation à l’image, que l’aide au scénario, la présentation de pitchs que la venue de différentes société de production, investisseurs ou institutions prêts à défendre un format délicat. En effet, rares encore sont les festivals acceptant des films courts de plus d’une demie heure, alors que cette durée est parfois nécessaire. A noter que Brive est aussi l’un des rares festivals où la parité est respectée puisque pour les 20 films en compétitions, on dénombre 14 réalisatrices, 12 réalisateurs et un collectif anonyme.
La sélection européenne, composée de vingt films, était divisée en deux grandes parties. D’un côté les films français et de l’autre les films européens. La première catégorie donne l’impression que le festival sert un peu de mouroir aux anciens étudiants de la Femis. Un tiers de la sélection en est issu, soit 7 films desquels on ne retiendra pas grand-chose sinon deux titres qui sortent du lot : L’Île jaune de Léa Mysius et Paul Guilhaume et Le Gouffre de Vincent Le Port. Le reste ressemble au tout venant d’une production formatée, qu’elle soit documentaire ou fictionnelle.
L’Île jaune raconte le périple amoureux et en bateau d’une préadolescente en vacances qui doit rejoindre un garçon pour lequel elle a eu un coup de foudre. Seul moyen de s’y rendre : faire croire à ses parents qu’elle passe une nuit en campement avec des amies pour partir à l’aventure en bateau avec une autre garçon, ombrageux, au visage brûlé et rejeté par tout le monde. La mise en scène est sobre, le scénario simple et bien écrit, avec une progression narrative intéressante où l’on passe d’un enfant sauvage contemporain à une version cruelle et cynique de Robinson Crusoé. Les acteurs sont bons, et la jeune fille, entretenant les clichés de l’entrée dans l’adolescence avec son lot d’hypocrisies, de méchancetés et de manipulations, est excellente. Seule la fin pêche par son réalisme confortable qui contraste trop brutalement avec ce qui précédait.
On est heureux pour le prix du public attribué au Gouffre de Vincent Le Port tant ce film change des œuvres consensuelles souvent primées par le plus grand nombre. Ici, dans un noir et blanc laiteux, une jeune femme part à la recherche d’une fillette disparue et tombée dans un ancien caveau qui mène au sous-sol d’un village où, selon des rumeurs, résiderait le diable. L’atmosphère envoûtante, parfois cauchemardesque, et la multiplicité de personnages secondaires plutôt surprenants du médium au punk, en passant par les touristes perdus et le migrant échoué, donnent à voir un monde au-delà du monde, comme un condensé de tout un cinéma du réel dans un voyage des plus énigmatiques. Seule, finalement, la protagoniste, par son côté profondément normal et sa manière de fédérer tous ces individus différents, sort du lot et parvient à s’engouffrer dans cette brèche rocailleuse d’où elle ressortira profondément différente. Le diable revêt différentes formes…
Outre la Femis, on notera que le journalisme aide un peu à la réalisation de moyens-métrages puisque sur les quatre réalisateurs qui ont officié sur les anecdotiques Rosiers grimpants (Lucie Prost et Julien Marsa) et Ronds-points de l’hiver (Laura Tuillier et Louis Séguin), trois ont collaboré à des supports web ou papiers sur le cinéma. Dans le cas du second, cela permet certainement de nouer des liens avec des « stars » du cinéma d’auteur vu son casting 4 étoiles: Lola Creton, Serge Bozon et Stanislas Merhar dans les rôles principaux. On accordera au premier film cité une mention pour leur jolie affiche.
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